Roland Bideau

 

                              Un dernier souffle

                                                Drame en 1 acte

 

                                     

 

 

 

 

 

 

Personnages

 

Vladimir: le souffleur entre 27 et 40 ans

 

Georges: directeur du théâtre entre 47 et 60 ans

 

Lui: l’entité du théâtre entre 25 et 35 ans

 

Elle: l’entité du théâtre entre 22 et 35 ans

 

 

 

 

Sous les planches d’un théâtre  au milieu des machineries et des décors, dans un dédale d’accessoires et de costumes, un lit et une table basse recouverte de livres, trônent au milieu de la pièce,  une grosse valise et quelques vêtements bien pliés sur une chaise, une lampe à pétrole. La lumière est sombre c’est la nuit.

  Un homme seul fulmine il tourne en rond, un peu plus loin arrive un autre homme, il range avec beaucoup de soin quelques costumes.

 

Le Directeur( Georges) : il fait des va et viens   Édouard qui n’est jamais là quand il faut.

 

Vladimir : C’est sûr Monsieur .

 

Directeur : Ses retards sont de plus en plus conséquents chaque jour et grignotent un peu plus mes nerfs, il ne connaît pas son texte, ricane comme un débutant, fait le beau avec la costumière et fait de l’œil à Georgette.

 

Vladimir : La pauvre!

 

Georges : Mais qu’est-ce qui m’a pris de prendre une célébrité ? Qui de plus, a vingt ans de trop pour le rôle.

 

Vladimir : Je ne sais pas Monsieur…

 

Georges : J’ai eu peur de prendre des risques, voilà tout !  Je sais qu’avec lui nos financeurs nous suivrons, enfin je l’espère! Les gens connaissent Édouard, ils  l’ont beaucoup aimé dans Othello, et dans le Cid il a remporté un vif succès…

 

Vladimir : C’est sûr Monsieur

 

Georges : Je suis fatigué, les comédiens m’épuisent ! Vous n’auriez pas un petit quelque chose à boire Vladimir ? Un remontant ?

 

Vladimir :  Je vais regarder Mr le directeur! Peut-être dans la grosse valise du régisseur.

 

Il sort 

 

Georges : Et Agnès ! ! ! Avec ses robes, ses fanfreluches, et ses millions de colliers qui font gling glong dès qu’elle aligne trois mots, « mais monsieur ça m’aide à composer le personnage ! » je ne la supporte plus, il m’arrive d’avoir envie de les lui faire bouffer. Une petite indigestion, et trois jours d’arrêt ne lui feraient aucun mal, à moi surtout.

 

Vladimir rentre

 

Vladimir : Il me reste un petit peu de whisky.

 

Georges : Oh ! Oui, un whisky, un double, avec une rondelle de citron, sans glaçons.

 

Vladimir : Euh… Vous savez les rondelles de citrons par ici… alors les glaçons …peut-être en plastique ! Ha! Ha!

 

Il rit seul et se ravise en voyant l’air  consterné de Georges

 

Georges : Le décorateur n’a pas  retouché le  petit salon,  la peinture se craquelle sur la porte,  ce décor a déjà servi à quatre créations, il faut absolument qu’il le retouche.

 

Vladimir : C’est sûr, Monsieur.

 

Georges : Sans ça les gens se diront que je n’ai plus les moyens. Ces décors peints ne valent rien, les escaliers sont ternes, j’aimerais avoir le budget des opéras, ou du cinéma.

 

Vladimir : Ce serait  bien Monsieur.

 

Georges : Dieu merci les nuages et le ciel ont été finis. Aaahhh ! ! ! Un whisky voilà exactement ce qu’il me fallait il se calme et regarde soudain la pièce comme s’il la découvrait pour la première fois Mais vous êtes très bien installé ici, Vladimir !. il s’assoit sur le lit et teste le matelas Un bon lit, une table de nuit voyez-vous ça , c’étais celle « du malade imaginaire », ce n’est pas le Carlton, mais vous êtes bien ici. Je vois que vous aimez la littérature, Molière, Racine, Marivaux,  un peu moqueur vous n’avez rien de plus contemporain? …il trouve un objet oriental et le prend  tiens c’est joli ça !

 

Vladimir : mon père me l’avait rapporté lors d’une tournée en Algérie.

 

Georges :  tout en regardant l’objet, rêveur votre père était quelqu’un ! Il avait le don de savoir parler aux gens, il savait écouter et  réconforter le plus déprimé des comédiens … ou des directeurs.

 

Vladimir : Mes parents étaient des passionnés …  ils étaient capables de parler spectacles et tournées, des nuits entières, cela me fascinaient.. Ça les a dévorés.

 

Georges :il se lève  il ne fait pas chaud ici  !

 

Vladimir :  il cherche des photos dans un livre j’ai gardé quelques photos de leurs spectacles, je m’amuse souvent à les regarder, bien sûr, on ne les reconnaît pas, ils avaient des masques ou des costumes parfois un peu étranges. elles ont un peu ternis il lui tend les photos mais fait mine de ne pas s’intéresser

 

Georges : lui tend le verre un dernier pour la route ! Vous vouliez me parler Vladimir ? Et bien dépêchez vous, je n’ai pas beaucoup de temps à vous accorder, il est déjà une heure du matin et les derniers raccords m’ont épuisé.

 

Vladimir : oui monsieur le directeur. lui resservant un coup de whisky

 

Georges : appelez-moi Georges, combien de fois faudra-t-il vous le répéter ?

 

Vladimir : bien … Georges. lui tend le verre

 

Georges :   lui prend le verre bon je vous écoute.

 

Vladimir :  soudain très nerveux  voilà . … Georges … comme vous avez du vous en apercevoir, je dors ici depuis trois semaines.

 

Georges: Oui Vladimir, et vous avez l’air bien, Non?

 

Vladimir: ce n’est pas que je me déplaise dans ce théâtre, c’est un peu ma maison depuis que je suis tout petit.

 

Georges: C’est vrai je vous ai connus tout petit, vous suiviez vos parents partout!

 

Vladimir: Oui, enfin bref, j’aimerai pouvoir changer d’air, et avoir ma vie, je ne me plains pas de passer beaucoup de temps dans le théâtre, mais j‘aspire à un peu de changement lorsque la journée est finie, vous me comprenez?

 

Georges : mais qu’est-ce qui vous en empêche mon cher Vladimir?

 

Vladimir : et bien… vous ne m’avez pas payé depuis deux mois et comme vous le savez, je n’ai pu garder ma chambre au foyer de Montauban, j’ai appris ce matin qu’elle avait été relouée depuis une semaine, alors voilà ! !Si vous pouviez me régler mes deux mois, je pourrais prendre une chambre d’hôtel  le temps de retrouver un logement.

 

Georges : mais vous n’êtes pas bien ici ?

 

Vladimir : c’est que voyez-vous …

 

Georges :oui je comprends fini son verre et lui tend les temps sont durs mon pauvre Vladimir, comment vous dire… croyez-moi, si j’avais l’argent je vous paierais, je ne vous cacherais pas que  le dernier spectacle n’a pas remporté le succès que j’attendais, que « nous attendions !. » Je ne voudrais pas vous retenir ici, je sais que vous aimez ce lieu mais  c’est vous qui avez insisté, pour continuer.

 

Vladimir: Je sais Monsieur!

 

Georges:  Une personne de votre qualité n’aura aucun mal à retrouver un bon poste dans un gros théâtre.  Je ne vous en voudrais pas si vous nous quittiez, je comprends votre désarroi, mais…. comprenez le mien.

 

Vladimir : je sais M. le directeur, mais j’aime ce lieu, c’est toute ma vie ces murs !

 

Georges : Il ne faut pas être trop sentimentalisme ,  je vous promets que je m’occupe de vous dès demain , j’ai un ami qui pourra  sans-doute vous loger dans un  hôtel très bien, juste le temps qu’il faut pour que la pièce démarre.

 

Vladimir: Merci Monsieur!

 

Georges: je sens qu’elle va remporter un vif succès, les gens sont très impatients  de revoir  Édouard sur scène, il est très connu vous savez

 

Vladimir: Je sais Monsieur.

 

Georges: nous avons d’une certaine façon beaucoup de chance de l’avoir sur le plateau. Et peut-être que cette fois ça marchera, le théâtre sera plein tous les soirs. Je reconnais qu’il faut vous sortir de là, ce n’est pas très sain, vous êtes pâlichon il faut vous aérer la tête je vous promets de trouver une solution. Oui! le plus rapidement possible !

 

Vladimir : Merci , monsieur, ah ! Autre chose Monsieur, le chauffage ne marche que partiellement  le réparateur devait venir aujourd’hui, mais il veut avoir un acompte, et je ne peux lui donner. Les coulisses ainsi qu’une partie de la salle ne sont plus chauffées.

 

Georges : le plateau est chauffé ? Ainsi que l’autre  partie de la salle, il me semble que c’est le devant du public? Donc rien ne presse si les gens veulent avoir chaud il devront payer le prix fort.

 

Vladimir : Oui mais cela est précaire, il risque de lâcher n’importe quand. Et je vous avoue que je vois mal M. Édouard jouer en écharpe et mitaines et encore moins Mademoiselle Aglaé..

 

Georges : Oui bien sûr ! Mais si cela devait se produire, je m’en occuperais personnellement, je téléphonerais au chauffagiste le plus tôt possible.

C’est tout ? Vous n’avez rien d’autre à me dire ?  Les lumières  fonctionnent ? Les sièges vont-il se décrocher ? Les pendrions tomber sur le décor ? Ou que sais-je encore … le théâtre s’écrouler ? Ha! Ha! Ha!

 

Vladimir : non monsieur le directeur.

 

Georges : Bien! je vous laisse donc! je suis très fatigué Vladimir ; vous allez une fois de plus nous servir de gardien … demain je vous le promets, je m’occupe de vous.

 

Vladimir : je voulais également vous parler d’un projet qui me tient à cœur.

 

Georges : un projet ? Ah ? Vous avez des projets ?! À quel propos ? Je vous écoute.

 

Vladimir : en réalité il ne s’agit pas réellement d’un projet … enfin d’une certaine façon... oui.

 

Georges : eh bien voyons, Vladimir, ne soyez pas timide, parlez ! Je suis à l’écoute.

 

Vladimir : voilà ! J’ai écrit une pièce, j’aimerais beaucoup que vous la lisiez….

 

Georges: formidable!

 

Vladimir: C’est sans prétention vous savez !

 

Georges: mais je vais la lire avec beaucoup d’intérêt et de curiosité

 

 Vladimir: à force de voir des gens jouer la comédie, de les voir réciter de belles phrases, et de les sentir prendre autant de plaisir, j’ai eu envie de raconter une histoire moi aussi. C’est une petite pièce vous savez, il n’y a que deux personnages, un homme et une femme, c’est une  histoire d’amour, évidemment. Cela fait quelque temps que je travaille dessus, Les passages d’amour des dernières pièces que vous avez montées ici m‘ont beaucoup  inspiré. J’aimerais  que vous me donniez votre avis                                                          

.

 

Georges : Et bien ! Vous me surprenez Vladimir, je ne vous savais pas écrivain

Je suis très impatient de la lire, et qu’elle est son titre?

 

Vladimir : je ne suis pas très sûr pour le titre, mais j’avais pensé à : «Un  dernier mots d’amour »…… Je suis stupide avec ma petite pièce, vous devez sans doute en recevoir des dizaines par jour.

 

Georges : Ne croyez pas cela. Je serais heureux de pouvoir contribuer à l’avancement de votre pièce,  Je vous reprendrais bien un verre de whisky. Et après je me sauve. Il fait chaud ici !

 

Vladimir : je vais en prendre un avec vous. il va chercher un verre pour lui et remplit les deux

 

Georges : trinquons ! … Au spectacle, et à votre pièce Vladimir.

 

Vladimir : au spectacle et aux rêves.

 

Georges : regarde sa montre et s’agite tout à coup  il faut que je me sauve Vladimir, pose le texte sur le lit de Vladimir pour prendre son manteau  passez une bonne nuit, reposez-vous, la journée va être longue demain. Au revoir Vladimir. Il part précipitamment

 

Vladimir : au revoir monsieur le directeur. Il voit le texte sur le lit Il a oublié le texte … bonne nuit! Il fait vraiment de plus en plus froid ici! Regarde son texte Je lui donnerai demain, s’il a le temps! Il est toujours pressé!

C’est vrai que c’est bien arrangé ici ! Un peu silencieux le soir mais joli.

 

Vladimir reste seul, il range avec une grande attention , reste devant son texte un moment sans l’ouvrir , il fini par prendre un livre et se plonge dans la lecture. Il fait des va et vient dans la pièce jouant certain rôle, comme pour se réchauffer il bouge de façon très « surjeu » , il se déshabille, se brosse les dents, fait sa toilette. Entre la brosse à dents et le gant de toilette il improvise des personnages et dit les répliques parfois drôles parfois tragiques, puis petit à petit, finit par aller se coucher toujours avec son livre. On le sent qui commence à piquer du nez.

« lui » et « elle » sont des  personnages qui apparaissent comme des lutins ils sont très mobiles jouent comme des enfants, ils ont un coté un peu poétique, à la fois brutale et plein de douceur. Durant toute la  pièce ils vont s’amuser avec les costumes et les accessoires changeant constamment de personnalité et d’allure, ils sont comme dans un rêve,  réaliste et  surréaliste.

 

Toutes les premiers répliques sont chuchotées comme des voix dans le vent

Voix 1 : c’est dans la lumière d’une étoile que tu es né !

 

Voix 2: j’ai froid

 

Voix 1: je ne peux voir plus loin que la barrière monsieur !

 

Voix 2: c’est sans doute la panne!

 

Vladimir :  se redresse soudain ily a quelqu’un ?

 

……

 

Voix 2: l’ambiance feutrée des premières !

 

Voix1: Il fait trop froid aujourd’hui ! Mon capitaine, j’allume les huiles?

 

Voix 2: il fera froid pour toujours ?

 

Vladimir: se frotte les yeux et se gratte les oreilles, dirige sa lampe vers les sons : y’a quelqu’un ? Tu dois rêver mon bon Vladimir, tu devrais te coucher sinon tu vas vraiment croire que tu deviens fou, allez ! je fini le chapitre et dodo !

 

Voix1 : silence ! Le spectacle va commencer

 

Voix 2: Monsieur, le public est là !

 

Voix 1 qu’il vienne!

 

Vladimir : tu es si seul mon pauvre Vladimir que tu entends des voix.

  il ferme son livre éteint la lumière et s’endort; onze coup de bâton puis trois coup lent, très doux presque inaudible

 

Elle: douce est la chaleur du lit de celui que le sommeil viens prendre.

 

Lui: calme est l’espace de ses songes qui vient glisser sous sa couche 

 

Elle: le temps ne passe ni par la porte ni par le soupirail

 

 apparaissent un homme et une femme en costumes sombres ils changent de costume, prennent des masques et des accessoires pour chaque personnages, cela va très vite, ils n’utilisent qu’un élément pour leur transformation.

 

Lui :  comment t’appelles-tu ?

 

Elle : je ne sais plus, Phèdre je crois ! Et-toi comment t’appelles-tu ?

 

Lui : je suis Harpagon, le grand le célèbre.

 

Elle : depuis quand es-tu Harpagon ?

 

Lui : depuis il y a tout juste quelques secondes, je le trouve triste est cruel comme mon humeur !

 

Elle : si tu es Harpagon alors je suis Andromaque, moi aussi je suis triste mais pas cruelle !

 

Lui : Non ! finalement je suis Knock ! Et je te soigne avec de la poudre de perlimpinpin venu de ma poche de charlatan ! Et voilà! Toc! A toi !

 

Elle : Tu veux jouer à ça ! D’accord, alors pour commencer je suis d’abord  Cléopâtre je gouverne sur un immense peuple, tous sont prêts à mourir pour moi , ensuite je suis Béatrice et je pleure mon amant que mon frère répudie, et pour finir je suis  Lady Anne, la grande et belle reine triste et intouchable.

 

Lui : toi belle et grande ! Laisse moi rire ! Triste oui.

 

Elle : tu es jaloux, parce que tu ne brilles que dans les valets depuis quelque temps.

 

Lui : mais pas du tout ! De toute façon les valets sont souvent bien plus intéressants que les jeunes premiers. Il y a plus de composition, d’interprétation, que fais-tu ?

 

Elle : elle regarde le ciel je compte les étoiles, j’accueille chacune de leur lumière que je  place au creux de mes mains, je sens la brûlure de leur clarté son mon visage et je respire l’aventure comme un parfum voluptueux. Et-toi que fais-tu ?

 

Lui : il regarde un verre d’eau posé sur la table de nuit je regarde les vagues se fracasser sur la roche comme  du cristal sur un carrelage froid, peut-être que demain, si je m’y prépare, je partirai avec toi.

 Les nuages s’évaporent, il va faire beau. Je peux voir chacune de tes étoiles, je les aime moi aussi.

 

Elle se jette sur une assiette que Vladimir avait laissé sur une chaise  ne mange pas si vite !

 

Lui : il boit le fond d’un verre voilà trois jours que je marche, je cherche toujours et encore, c‘est toujours plus dur dans un corps plus vieux. il prend la photo de l’acteur qui joue en ce moment c’est un vielle acteur les cheveux blanc On croit savoir, mais lui  pense se souvenir,  il se raccroche à sa mémoire et il nous éjecte comme une vulgaire enveloppe! Oh oui j’ai faim, j’ai faim de justesse et de fraîcheur ! Je suis même affamé ! Tu ne manges rien ? S’attaque à un bout de pain

 

Elle : j’ai le trac, je serais incapable d’avaler une bouchée.

 

Lui : tout se passera bien, relax ! Respire ! Il se sert de vin

 

Elle : je sais !  Fous-moi la paix avec les conseils, je suis capable de gérer mon trac, j’ai seulement peur des réactions, mon texte est là je me fait confiance. Mais jamais personne ne nous a vus ! C’est une grande première, je ne suis pas sûre d’avoir pris la bonne apparence, un vieil amour de jeunesse! C’est peut-être un peu brutal, non?

 

Lui : les réactions ? Je m’en bats l’œil des réactions, ce qui m’intéresse c’est d’y croire, il regarde son quignon de pain bravo,  tu es stupide avec tes angoisses, je ne peux plus avaler une bouchée, Je…

 

Elle : Vladimir bouge chute … il se réveille.

 

Lui : j’aimerais être à sa place, il ne m’a jamais été permis de faire mes propres rêves.

 

Elle : toute ta vie n’est qu’un rêve, alors arrête tes inepties.

 

Ils se retrouvent autours de Vladimir

 

Lui : tu parles d’ineptie !

 

Elle : tu la fermes oui !

 

Lui : toi tu la fermes ! Ils se courent après autour du lit

 

Elle : tu n’es qu’un gougnafier !

 

Lui : tu es pire qu’une pie !

 

Elle : tu vas me le payer, vieux Bouc.

 

Lui : grosse truie mal dégrossie  !

 

Elle :  furoncle égocentrique !

 

Lui :  erreur de la nature !

 

Elle : hareng saur décoiffé.

 

Lui :  Ah ! Un hareng décoiffé ?

 

Vladimir : se levant mais qui …

 

Lui et elle : chut tttt calme … on recule chut … chut.

 

Vladimir : qu’est-ce que vous fichez ici ? Comment êtes-vous rentrés ?

 

Elle: écoute-moi

 

Vladimir: Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ? Se levant de son lit il se précipite sur une vielle malle

 

Elle: regarde-moi ! Et écoute-moi !

 

Vladimir :sort un pistolet de scène en carton pâte: je suis armé je n’hésiterais pas à tirer

 

Elle : il va pas faire ça ?

 

Lui :  il va être gentil ?

 

Elle : elle amène une table ou sont posé tout un service à thé tout les élément doivent-être très théâtrale très colorés venez boire le thé

 

Lui : un café ? Lui tends une tasse

 

Elle : biscuits ? Lui tend une assiette pleine de gâteau extraordinaire

 

Lui : vous mettez du lait dans votre thé ? Il le sert

 

Elle : le café vient du Mexique, un vieil ami nous en ramène chaque fois qu’il y va.

 

on entend le bruit d’un train au loin, Vladimir boit le thé machinalement comme ci cela allait le réveiller.

 

Lui : il met une casquette de contrôleur et prend une lampe à huile qu’il allume très fort billet s’il vous plaît !

 

Elle : elle lui tend un billet voilà

 

Lui : vous n’avez pas de billet Monsieur ?

 

Vladimir : il ne sait plus où il est  non ! Mais je ne suis pas dans un train.

 

Lui : il lui met la lampe sous les yeux silence ! Nom ! Prénom ! Date de naissance ! Votre code confidentiel à huit chiffres ! Avez-vous une carte d’identité ou un passeport ? Montrez-le-moi ! Votre numéro de sécurité sociale ! Permis conduire ! Groupe sanguin !

 

Vladimir :ne sachant quoi faire  Vladimir Vlassov, 30 janvier 1925, oui mais pas sur moi !

 

Elle : ça va vous coûter cher.

 

Lui : que faisiez vous la journée du 20 avril 1960 ?

 

Vladimir : je ne sais pas ! Se rebiffant Mais vous n’avez pas répondu à ma question ? Qui êtes-vous ?

 

Elle : elle lui  prend sa tasse et la boit d’une traite  vous buviez du thé dans lequel vous trempiez tranquillement votre biscuit. Vous le saurez bientôt

 

lui : alors ces biscuits, un ami nous les a ramenés de …

 

Vladimir :  en colère oui je sais du Mexique !

 

Elle : Ah ! Non très cher, ils viennent d’Angleterre ! L’air est frais, tenez cette veste vous allez attraper froid. Elle lui met une veste de 18e très longue

 

Lui : un peu longue au niveau des manches, mais pour le rôle elle vous ira très bien. Il lui accroche une cravate 18e

 

Vladimir : quel rôle ?

 

Lui:il le manipule comme un marionnette, lui passe de la poudre de riz sur le visage  la tête haute, regardez toujours droit devant vous quand vous plongez votre regard sur le public, ou sur la ligne bleue des Vosges, attention ! Au début vous ne verrez rien, mais vos yeux S’habituent, il se place derrière lui  le public apparaît comme une photo plongée dans le révélateur. Ne tremblez pas, ne touchez pas votre visage après le maquillage, vous êtes en danger, tout le monde vous regarde, gare aux trous, n’improvisez que si cela est nécessaire, ne grimacez pas inutilement, ne tournez jamais  le dos au public, jouez avec l’autre, jouez naturel, ne déviez jamais de la lumière, les décors sont fragiles ainsi que les costumes, installez vos accessoires, vérifiez tout, êtes-vous prêt ? Et bien merde mon vieux !

 

Elle : voyez ce n’est pas si compliqué. M’accorderez-vous cette danse ?

 

Lui : toujours derrière lui mais je ne sais pas danser !

 

Vladimir : mais je ne sais pas danser.

 

Elle : ne discutez  pas ! Laissez-vous aller, je vous guiderai…prenez ma main… Dieu ! que vos doigts sont froids ! Je vous ai vu hier, vos yeux brûlants se sont posés sur moi ! vous me touchiez, les seins, les hanches, ce corps que vous effleuriez des yeux, glissez maintenant vos mains froides au travers !

 

Lui :il se colle à Vladimir et continu de le manipuler Ce corps froid que vous sentez madame, serez-vous assez patiente pour le réchauffer dans sa totalité car mes mains flambent à l’idée de vous faire une caresse.

 

Vladimir : mais je connais ce texte c’est moi qui l’ai écrit.

 

Lui : se reculant ceci n’est pas écrit dans le texte, n’improvisez que si cela est nécessaire ! ! !Nous n’y arriverons jamais ! reprenons.

 

Vladimir : comment connaissez-vous ce texte ? personne ne l’a encore lu, vous me faites peur. Ne me touchez pas, c’est vous qui êtes glacé.

 

Lui : Vladimir ! Tu ne nous reconnais pas ?

 

Elle : As-tu oublié toutes les soirées que nous avons passées ensemble.

 

Lui : moi je m’en souviens d’une, une longue soirée où le public hostile à la modernité de la pièce, huait le comédien, un jeune freluquet qui faisait ses débuts au théâtre, il était planté sur le milieu de la scène, et continuait de jouer, coûte que coûte.

 

 Elle: durant la réplique « lui » mime la scène  C’était la première fois qu’il jouait dans un aussi grand théâtre, son rêve devenait réalité, mais il n’était pas encore prêt, les répétitions s’étaient enchaînées à toute allure et là, sur la scène, tout seul, le grand jour de la première  il avait oublié son texte , un petit texte tout simple. De toutes ses forces il m’a supplié de lui venir en aide la salle est silencieuse le public ne sais trop quoi faire, il oscille entre le rire et la consternation , puis soudain comme par miracle un son sort de sa voix un son incroyable ; le public est médusé son corps devient une histoire, chacun de ses mouvements nous le raconte,  il est là, bien vivant. Le bruit assourdissant de la vie lui monte au cerveau, tout lui a échappé, il suit son guide, la pièce se joue, le rideau tombe puis se relève le public est debout silencieux … un premier clac sourd retentit comme une gifle sur une peau tendre, puis vient le triomphe: le public est debout, exalté et heureux.

 

Vladimir : « Il faut qu’une porte soit ouverte où fermée » une pièce d’Alfred de Musset , elle a fait une tournée.

 

Lui : Berlin, Moscou.

 

Elle : Athènes, Rome, San Francisco, Madrid.

 

Vladimir : vous l’avez vue ? La pièce a remporté un grand succès aux Etats-Unis, Firmin est resté là-bas il tourne dans des films vous savez ?

 

Lui et elle : on sait !

 

Elle : et cette jeune femme, dix-sept ans à peine c’était juste avant la guerre, elle avait un visage que l’on oublie pas, fine et  pâle comme le sucre.

Tu l’aimais n’est-ce pas Vladimir ? Quelle dommage  et quelle idiote d’avoir suivi ce soldat, il aura été sa perte.

 

Vladimir: Justine! Je me souviens d’elle.

 

Lui: tu as peur ?

 

Vladimir : un peu oui!

 

Lui: mauvaise réponse !

 

Elle: recommence !

 

Vladimir: recommencer quoi ?

 

Lui: tout depuis le début !

 

Elle: il ne faut pas avoir peur, juste douter !

 

Lui: tu as confiance en toi ?

 

Vladimir : je ne sais pas !

 

Lui: mauvaise réponse !

 

Vladimir: il à un dernier coup d’énergie, mais qui va être sabré il est comme hypnotisé par ses curieux personnage comme entraîné dans un rêve ma vie n’a rien de très passionnant, vous allez finir par vous ennuyer, vous feriez mieux de partir, je n’ai rien à vous offrir, il fait aussi froid que dehors, et je n’ai qu’un lit, je n’ai rien de bien précieux, juste un petit fond de whisky, je vous l’offre si vous voulez, mon portefeuille est vide et il n’y a pas d’argent ici, vous pouvez vérifier si vous voulez!

 

Lui: nous n’avons pas besoin d’argent

 

Elle: et nous n’avons pas envie de dormir!

 

Vladimir: mais alors que me voulez-vous? Je suis fatigué il est tard et j’ai une grosse journée devant moi.

 

Lui : nous vivons ici depuis fort longtemps Vladimir, si tu ne nous a jamais vu c’est que tu n’en a jamais eu envie.

 

Elle: on a juste envie de discuter, c’est comment ta vie lorsque tu sorts d’ici? Tu t’amuses, tu vois des filles ? Elles sont jolies ? Elle prend le texte de Vladimir Les histoires que tu racontes dans ces pages c’est ça ta vie ?

 

Vladimir: donnez moi cette brochure, elle est à moi

 

Lui: donne-lui !

 

Elle: elle est jolie la couverture, c’est toi qui l’a faite ?

 

Vladimir: oui plus ou moins, ce sont des collages de plusieurs anciennes affiches !il arrache son texte des mains de « elle »

 

Lui : On peux s’asseoir, juste un instant ?

 

Vladimir: est-ce que j’ai le choix ? Allez-y, installez-vous ! mais ne restez pas trop longtemps, je vous en prie.

 

Luiils sont tout les trois assis sur le lit de Vladimir  qui lui est au milieux d’eux On bavarde un peu?

 

Elle: tu as de la musique ?

 

Vladimir: j’ai quelques disques, vous n’avez qu’a choisir !

 

Elle: j’aime danser ! Elle met de la musique

 

Lui : tu as toujours aimé!

 

Elle: plus comme avant, j’aimerais danser pour moi et ne pas avoir ces mille visages imposés avec leurs postures et tout ce qui va avec, j’aimerai porter un enfant et sentir mon ventre gonflé par la vie, sentir le parfum des fleurs sauvages sans avoir à les cueillir, souffler sur ces drôles de fleurs qui s’envolent dans les airs.

 

Vladimir: des pissenlits ?

 

Elle: Oui c’est ça des pissenlits !

 

Vladimir: vous n’avez jamais vu de pissenlits ?, vous n’êtes jamais allée à un bal de 14 Juillet?

 

Elle: Non !

 

Vladimir: mais c’est impossible !

 

Lui: Ce n’est pas si simple

 

Vladimir: si c’est simple, vous prenez votre vie à bras le corps, et vous la menez comme bon vous semble.

 

Lui: comme toi par exemple ?

 

Vladimir: non, moi je ne suis pas un bon exemple!

 

Lui: tu vois ce n’est pas si simple !

 

Vladimir: mais ça peut le devenir, à deux vous êtes plus solides, vous pouvez tout envisager vous ne vous retrouverez pas tout seul comme un idiot si ça ne marche pas.

 

Elle: tu n’as jamais regardé un tableau en te disant que tu aimerais bien vivre dedans ? Tu vois chaque détail ,chaque couleur te semble familière, tu sens l’odeur  le bruit et l’ambiance  qui s’en dégage, tu as l’impression qu’il faudrait juste prendre ton élan et sauter dedans .. Tu es prêt à le faire mais au dernier moment tu te ravises car tu sais que ce n’est qu’une toile à l’huile.

 

Vladimir: Oui j’ai déjà connu cette sensation, pas avec un tableau, mais un roman que j’ai lu lorsque j’étais enfant, ça a été une révélation, à la fin du livre j’avais l’impression d’avoir perdu quelque chose, un ami, j’étais tiraillé entre l’envie de le relire et celui de rester dans  le souvenir et les sensations qu’il m’avait provoqués. Je l’ai relu adulte et j’ai été très déçu, l’histoire étais simplette et pas très bien écrite, j’étais loin du souvenir qu’il m’avait laissé. Quand j’y pense, je m’endormais tout les soirs en y rêvant, je faisais la suite, j’imaginais ce qu’il pouvait arriver aux personnages.

 

Elle: on entend des rires d’enfants une musique de balle des gens rient, une lumière de lampions, elle se lève et danse , j’ai envie de faire la fête, de danser sous une guirlande lumineuse, oh oui ! j’aimerais danser sous des lampions comme dans un bal de 14 juillet , avec les petits drapeaux qui claquent au vent, les enfants qui courent partout et vous lancent des poignées de confettis ! C’est ainsi que ça se passe ? n’est-ce pas Vladimir ?¨être dans une foule et sentir que tous me regardent, moi ! tu dois te dire que je suis prétentieuse, car après tout je n’existe que par la volonté des hommes à vouloir raconter, j’aimerais pouvoir aimer une seule fois pour moi même, une petite amourette d’un bal d’été.

 

Vladimir: vous n’avez jamais aimé ?

 

Elle: des milliers de fois! , j’ai aimé oui, par transposition au travers d’auteurs passionnés et frustrés à la fois  Mais je n’ai  jamais aimé  pour moi même. Nous n’existons que parce que tu as bien voulu croire en nous, mais es-tu sûr de ne pas rêver ?

 

Vladimir: Vous voulez dire que je rêve là ? Ça me rassurerait parce que je commençais à me poser des questions sur mon état mental.

 

Elle: Je n’ai pas dit cela ! Tout s’arrête la musique,  la lumière redevient celle du théâtre

 

Vladimir: si c’est un rêve, c’est la première fois que j’en fait un comme celui-ci , c’est d’un tel réalisme !

 

Elle: je n’ai pas dit que tu rêvais Vladimir, c’est toi qui le suppose. Mais imagine une seconde que tout les rêves humains ne soient en fait que la réalité, et que ce que tu appelles réalité ne soit qu’un long rêve que tu reconduits tous les mêmes soirs

 

Vladimir: ces rêves seraient bien tristes enfermés dans  ce théâtre !

 

Elle: moi c’est ma réalité .

 

Vladimir: mais d’où venez-vous ?

 

Lui : enfin une bonne question !

 

Elle: on va te raconter !

 

Lui : c’est une drôle d’histoire

 

Elle: c’est le début de la conscience

 

Lui: le début du désir

 

Elle: La rencontre entre l’homme et le rêve

 

lui: entre l’allégorie et la folie

 

elle: la fine ligne qui sépare le délire du réel

 

lui: le début des croyances on entend soudain des bruitage d’animaux et de nature sauvage

 

Durant la narration « d’elle » « lui » va vivre ce qu’elle raconte

 

elle: la lumière se fixe sur lui, vladimir et « elle » sont dans la pénombre  imagine la préhistoire, l’homme se réveille dans cette immense forêt, autour de lui vit sa petite communauté, ils sont une trentaine, le matin d’une grande chasse. Voici quelques jours que le gibier se fait rare, ils ont tous faim, il faut penser aux femmes qui vont enfanter et aux enfants, ils décident de se diviser en plusieurs groupes de deux : l’un part devant pour rabattre une éventuelle proie et l’autre attaque lorsque celle-ci est proche. L’homme se retrouve à l’arrière, il n’est pas content car on l’a mis avec un jeune, trop fin et tout petit. Mais on le dit très habile et sa petite taille lui permet de se glisser partout et même dans certains petits trous pour y débusquer de petites proies. Il fait froid aujourd’hui c’est le premier jour des glaces, le sol est très glissant.  Malgré un soleil éclatant l’homme sent ses mains refroidir, sa lance devient difficile à tenir, il entend un grand bruit derrière plusieurs arbres qui s’alignent devant lui. Puis, soudain, c’est le choc ! Un animal énorme surgit devant lui, il n’en a jamais vu d’aussi gros ni de ce genre, il a peur, il recule, l’animal est là juste à quelques mètres. Lui aussi est terrorisé, ils ne savent quoi faire l’un comme l’autre, la main de l’homme qui tient l’arme est gourde de froid, son seul réflexe est de reculer, mais il n’ose regarder où poser son pied, il sait qu’il ne faut pas lâcher l’animal des yeux, son pied bute sur une racine il tombe à la renverse. L’animal effrayé fait un bond en avant, l’homme n’a qu’une dernière image avant de s’assommer sur une pierre, durant ce court laps de temps où il est inconscient sur ce sol gelé son esprit va s’oublier et il va rêver de cette curieuse bête, de forme et de couleurs, de choses qu’il ne peut comprendre  l’imaginaire se mélangera à la réalité. Lors de son réveil il veut parler à son compagnon de chasse mais lui n’a rien vu, et ne peut croire ce qu’il raconte, le langage n’est pas encore élaboré il manque des mots essentiels. Alors, arrivé dans son camp il va commencer à les mimer, mais les autres ne comprennent pas, l’homme recommence une fois, deux fois et ainsi de suite jusqu’au moment où il se rend compte qu’il trouve cela amusant de refaire la scène de la modifier de la manipuler et de rajouter un détail par ci un geste par là, d’imiter le grognement de la bête, et le cri de l’homme qui veut se battre. L’histoire de l’homme plait à ses compagnons, ils veulent qu’il la raconte encore et encore le soir lorsque la nuit tombe et que les cœurs ont peur, cette histoire les rassure et leur permet de croire qu’ils sont encore très forts même lorsque les ténèbres les envahissent et qu’ils ne savent pas si la lumière chaude sera là demain.

L’homme raconte son histoire et quelque chose d’étrange se passe en lui dans son corps et dans son esprit. Il a le sentiment de revivre cette aventure, ça l’étourdit, il ressent à la fois de la peur et de la joie, il raconte et vit en même temps son histoire tout en sachant qu’il vit le moment présent : il découvre le jeu !

 

Lui: nous sommes nés ce jour là où l’homme a eu besoin de nous pour incarner son personnage et ainsi ne pas sombrer dans la folie. La lumière redevient celle du théâtre

 

Elle tu as peur Vladimir?

 

Vladimir:  oui, vous me faites peur! Vous êtes une sorte de fantômes ?

 

Elle: la peur nous tue, elle nous paralyse comme le lapin devant les feux de voiture, nous empêche de réfléchir et fait de nous des animaux, de l’instinct juste de l’instinct, et rien derrière.

 

Lui: tu rêves ?

 

Vladimir : ben oui comme tout le monde !

 

Elle: c’est quoi tes rêves ?

 

Vladimir : ils sont tous différents.

 

Lui: en es tu sûr?

 

Vladimir: il y en a un qui revient souvent !

 

Elle: raconte nous, s’il te plaît ?

 

Lui: Une histoire pour nous ! Un rêve que l’on peu écouter !

 

Vladimir: ce n’est pas passionnant, vous savez !

 

Elle: raconte !

 

Vladimir: Je suis sur le toit d’une maison, il y a du vent, beaucoup de vent, je sens qu’un orage arrive, je me lève pour rentrer, c’est un toit de vieilles tuiles rouges, l’une d’elle est cassée, mon pied se prend sur un objet dur et je glisse sur le toit. Celui-ci est étrangement long ; j’essaye sans grand succès de m’accrocher aux tuiles mais cela ne sert à rien, je ressens la peur. En bas du toit il y a la mer. Je suis presque rassuré de tomber dans l’eau, alors je me laisse aller, je ne ressens que du bien être mais cela ne dure pas très longtemps car ma chute s’éternise, et le vertige se fait ressentir, je regarde les nuages, d’énormes masses grises s’accumulent au dessus de moi,. Je touche enfin le sol, ce n’est pas de l’eau mais du sable, la mer a totalement disparu, je cherche désespérément  des yeux une ligne horizontale bleue, et ce que je vois à la place me terrorise, une gigantesque vague de plusieurs dizaines de mètres se dresse devant  moi, j’essaye de fuir mais le sable embourbe mes pieds et je n’arrive plus à avancer. Je me réveille toujours avant que la vague s’abatte sur le sable.

 

Lui : passionnant !

 

Elle: impressionnant ! Comme j’aimerais pouvoir faire ce rêve juste une fois !

 

Vladimir: vous savez c’est plutôt un cauchemar !

 

Elle: peut importe !

 

Lui : ce qui est sûr c’est que tu as des problèmes

 

Vladimir: Non, je n’ai pas de problèmes.

 

Lui : avec des rêves comme celui-ci, je crois que si !

 

Elle: Tu es un lâche ! tu t’es écrasé comme une souris face au chat devant le directeur ! Tu avais une pièce de théâtre à lui proposer, il est parti en l’oubliant sans doute exprès, tu n’as pas réagis tu t’es retranché dans tes fourrés sauvages

 

Lui: qu’est-ce que tu as dans la vie tu peux me le dire ?

 

Elle: inventaire extérieur de monsieur Vladimir Wlasof  ils tournent autour de ses objets les prennent et inscrivent dans un petit carnet, comme des huissiers pour une saisie.

 

Lui: un lit !

 

Elle: une couverture !

 

Lui: une douzaine de livres qui appartenaient à ses parents

 

Elle: une grande valise

 

Lui: trois pantalons, c’est pas beaucoup !

 

Elle: deux chemises

 

Lui: un pull chaud

 

Elle : une paire de chaussures et une paire de chaussons !

 

Lui: quatre verres dont un ébréché

 

Elle : une petite tour Eiffel

 

Lui : Plusieurs photos, des gens déguisés, vos parents ? Oui ! je me souviens !

 

Elle: vingt francs, une barre chocolatée !

 

Lui : du courage

 

Elle: de l’amertume

 

Lui : des regrets mais aussi des moments forts.

 

Elle: de l’aventure et du sens pratique .

 

Lui : dégât des pertes ?

 

Elle: des rêves d’enfants, un amour, deux livres, un chapeau en feutre mou,, de la mauvaise conscience, du temps pour rien et un manque de temps, des souvenirs en pagaille !

 

Lui : soudain l’espace devient celui d’une administration prenez votre fiche rouge, c’est le premier escalier sur votre droite, puis porte gauche au fond du couloir suivez les panneaux « objets perdus et oubliés »

 

Lui :la lumière est sur votre droite, vous demanderez à la dame le casier 8523

Ne l’ouvre pas trop vite, parfois les objets sont agressifs sans le savoir, il faut être doux avec eux, les caresser dans le sens du poil, les amadouer.

 

Elle: parfois les objets rappellent des souvenirs, vous avez alors la sensation d’un immense silence. Réagissez, ne vous laissez pas emporter dans le coton gluant du mépris, laissez parler vos émotions, ne perdez pas le « laisser-aller » comme sur le toit !

 

Vladimir: je ne me sens pas bien, vous avez mis quoi dans votre thé ? De la drogue ? Du poison ?

 

Elle: j’ai plongé mes lèvres dans votre tasse!  La lumière redevient celle du théâtre Vous n’avez donc rien compris

 

Lui : parmi vos souvenirs j’ai trouvé cette lettre! Il sort une lettre de sa poche

 

Elle: j’ai peur de mourir, Vladimir ! c’est un peu bizarre de dire cela alors que je n’existe pas vraiment, mais je respire, je hume le silence de ce théâtre et son odeur de transpiration. Ce lieu est vivant c’est notre poumon,  et notre cœur c’est votre lumière celle que vous avez en chacun  de vous et qui vous permet de croire en l’impossible.

 

Lui: lorsque tu es sur scène, le moment ou tout t’échappe ou la peur disparaît, et bien nous sommes là, prêts à bondir, à prendre ce corps à l’incarner, tu as l’impression que ton corps s’est divisé et qu’une partie regarde d’en haut et rigole ; mais non, tu es juste deux avec nous et pour faire de la place une partie de toi est devenue nous, c’est celle qui regarde et qui rit.

 

Elle: sans histoire, sans théâtre nous n’existons pas, c’est notre nourriture, le comédien fait appel à nous sans le savoir et nous vivons dès que la lumière est sur lui, dès qu’un seul spectateur le regarde !

 

Lui: parfois le comédien est trop arrogant ou le corps ne nous accepte pas, alors nous le laissons faire seul, mais la tristesse l’emportera  en sortant de scène il n’aura pas eu le grand frisson et il aura l’impression d’avoir perdu quelque chose. Cela arrive souvent, de plus en plus souvent.

 

Elle: si Juliette meurt sur scène moi je meurs vraiment, je ne renais que le lendemain  lorsque la lumière m’appelle .

 

Vladimir : Je ne comprends pas !

 

Elle: il n’y a rien à comprendre, Vladimir, nous ne sommes que les entités de ce lieu, nous servons les comédiens, nous ne sommes pas des fantômes, juste les âmes du jeu et de la comédie, celui qui rit et celui qui pleure!

 

Vladimir: Pourquoi venez vous me voir ?

 

Lui : pour te faire comprendre des choses !

 

Elle: pour te faire accepter certains choix

 

Lui : pour cela nous allons faire des petits tours dans le temps et dans ton cerveau.

 

Elle: n’aie plus peur!

 

Elle le fait tourner sur lui même, il a la tête qui tourne et du mal à retrouver son équilibre, durant toute la scène Vladimir est abasourdi.

 

Lui: casier numéro 8523 lumière d’administration à chaque changement  de situation Vladimir se laisse mener et croit en tout ce qu’il vie

 

Elle: elle ramène un grand meuble métallique plein de tiroirs  à petites roulettes tiroir n° 3 le tiroir du temps.

 

Lui : l’enfance.

 

Elle: trois billes, un cahier d’écolier avec quelques poésies infantiles, elle se met une bille devant l’œil, vision verte et bleu  elle chante

                              Dans la brume bleutée est posé un bateau

                             Dans le vent et la colère du ciel il chaloupe et se tord

                              Le marin n’a pas peur car la mer est son cœur

                              Le bateau tiendra bon car l’homme est son poumon

                             Il gifle la houle craque et brise les vagues indécises

                             Il n’a plus peur de rien et avance sur une mer en péril

                             Les poissons sont heureux ils rigolent et font les marioles

                              Tout en bas dans les fonds bleu marine leurs lueurs coquines

                              Dansent et se tordent de joie car ils se disent ma foi

                              Aujourd’hui si le ciel ne l’est pas, nous, nous seront tranquilles

 

Lui: Tiroir n° 8, une lettre adressée à  Lili ? Julie? Noémie ?  Coralie?

 

                                                                                                                                            

Vladimir: c’était Émilie, il y a longtemps, mais elle n’a jamais fait attention à moi, elle aimait les fiers à bras les gros durs qui vous cassent la figure à la sortie de l’école, je ne sais pas si elle l’a lue, en tout cas elle ne m’en a jamais parlé, elle a fait comme si de rien n’était, j’étais très vexé à l’époque ! Mais comment avez-vous eu tout cela ? vous faites partie des gens qui fouillent dans les poubelles ?

 

Lui: nous fouillons dans ta tête c’est plus rapide, chaque chose y est bien rangé à sa place même si pour toi c’est parfois le désordre .

 

Elle: continuons ! Une boîte de chocolats et une montre à gousset cassée ! Tu te souviens ?

 

Vladimir: la boîte de chocolats ça remonte à mes 9 ans , je l’avait eue pour mon anniversaire, le chocolat était rare, c’était la guerre, je me souviens ne pas y avoir touché durant des années, c’était mon trésor. Je les ai goûtés très longtemps après ; ils avait ranci, mais pour moi ils étaient délicieux, sans doute parce que je n’en avait jamais mangé avant ou alors parce que j’avait attendu .

 

Lui : et la montre, ça te dit quelque chose ? Elle est à toi ?

 

Vladimir: oui et non! Je l’ai trouvée dans une maison voisine de la mienne, juste après la guerre. Les allemands l’avaient réquisitionnée, le jour de la libération les Fritz sont partis précipitamment, je l’ai trouvée sur une table, devant un repas pas même entamé. Ils avaient du être pris de court.

 

Elle: les gros aux pralines sont délicieux, prends-en un si tu veux

 

Vladimir: merci! Il en prend un ferme les yeux Je voyage dans le temps c’est incroyable comme les goûts peuvent nous amener des images de notre enfance, vous pouvez remarquer d’ailleurs que les odeurs et les goûts nous ramènent des souvenirs de notre enfance mais jamais un souvenir de l’âge adulte, nous ne sommes plus émus par les odeurs peut-être.

 

Elle : tiroir n° 20, une photo de toi ! Tiens ! tu avais la barbe, ça te donnait un air fier, un peu sérieux…

 

Lui : fais-moi voir ! Tu voulais te vieillir ?

 

Vladimir: j’avais 20 ans et à cette époque tout le monde portait la barbe : c’était à la mode !

 

Lui : tiroir n° 35, la photo d’un homme saoûl dans un parc, une bougie et une boîte d’allumette, une invitation pour une première : « la double inconstance » de Marivaux

 

Elle: tiroir n° 28 , un télégramme de ta mère, un ballon gonflable !

 

Lui : tiroir n°31 un billet d’avion pour l’Afrique, une lettre de ton banquier !

 

Elle: tiroir n ° 27 une lettre de rupture, un bouteille de parfum, un rose desséchée

 

 Lui: tiroir n° 1 une lettre de la mairie, pour Monsieur Georges Simon, elle est datée d’il y a 2 mois

 

Vladimir: cette lettre n’est ni pour vous ni pour moi, elle s’adresse au directeur du théâtre

 

Lui : mais tu n’as pas envie de savoir ce qu’elle contient, peut-être de nouvelles subventions ?

 

Elle: peut-être un soutien, ou une commande pour une nouvelle pièce d’un jeune auteur ? comme toi par exemple.                                                                                                                                

                                                                                                                                

Vladimir: le directeur nous en aurais parlé, ce doit être quelque chose de grave ou sans aucune importance.

 

Lui : je l’ouvre. La lumière du théâtre revient

 

Elle: « Monsieur,  voici plusieurs lettres que nous vous écrivons. Comme nous vous le précisions dans notre dernière correspondance  votre théâtre est depuis plusieurs années le sujets de nombreux questionnement, nous vous avons donné il y a quelques temps un ultimatum, car ce dernier n’était plus rentable, que les subventions culturel avaient terriblement baissé et qu’un tel lieu revenait trop chère pour la mairie, vous n’avez pas fait de suffisante d’entrées et les bénéfices n’ont pas couvert l’énnorme  dette que vous avez. voilà maintenant plusieurs mois que nous vous avons demander de vider les lieux, car vous n’êtes pas sans savoir qu’il doit être démolit le plus rapidement possible, les promoteurs ABRINOTS vous ont à plusieurs reprises expliqués que leurs travaux prenaient un sérieux retard du à votre résistance, ………….Vladimir continu en silence

 

Vladimir: ce n’est pas possible ? il ne peut pas !

 

Elle: tu n’étais même pas au courrant ?

 

Lui : imitant Vladimir Monsieur le directeur voici deux mois que je n’ai pas été payé !

 

Elle: même jeu avec Georges  vous ne pouvez pas rester ici Vladimir ce n’est pas saint pour vous, il faut vous aérer la tête Vladimir !

 

Lui: cela fait des mois qu’il te fait du pied pour que tu partes

 

Elle: Il a peur de vous annoncer la fermeture du lieu. Il en est responsable, voici des mois qu’il se prépare pour un  concours administratif, il a eu la réponse il y a deux semaines, il signe ici sa dernière mise en scène

 

Lui: il se fait un petit cadeau ! Mais il ne veut pas que son équipe soit démotivée, voilà pourquoi il ne vous a rien dit.

 

Elle: il ne sait pas qu’il nous élimine , il s’en fiche, ce ne sont que des murs ! Il y aura ici un superbe parking, ou un complexe commercial, ou mieux encore des bureaux administratifs. Qui s’élèveront sur des dizaines de mètres : de grands immeubles en vitres teintées.

 

On se retrouve soudain dans un bureau , petite table avec quelques prospectus , douche sur les lieux

Une secrétaire à lunette est assise derrière la table que divers objets et dossiers recouvrent

 

Elle : elle parle à une personne imaginaire pour un rendez-vous avec Monsieur Simon il faut un justificatif de domicile et les huit dernières factures de téléphone, ainsi que les quittances de loyer au complet, une lettre de votre logeur pour bonne conduite et votre pièce d’identité avec un extrait de casier judiciaire, vierge bien-sûr !

Vous pouvez attendre votre tour derrière la ligne jaune et prenez un ticket, on vous appellera. Suivant ! numéro 20852 !

 

Lui: c’est à vous !

 

Vladimir: à moi ? Mais je n’ai pas de ticket !

 

Lui: tenez je vous passe le mien, dépêchez-vous, elle va prendre le numéro suivant

 

Vladimir: et vous ! Vous n’avez plus de ticket ?

 

Lui: moi j’ai l’habitude d’attendre ! Allez y! il le pousse devant le bureau

                                                                                                                                            

Elle: numéro 20852 ?                                                                                                                      

 

Vladimir: oui c’est moi !

 

Elle: c’est pour quoi?

 

Vladimir: je ne sais pas ? Je connais Monsieur Simon, j’aimerais lui parler!

 

Elle: pas le temps ! Prenez rendez-vous !

 

Vladimir : je crois que vous ne comprenez pas ! J’ai travaillé 10 ans pour lui, je le connais depuis toujours, il étais directeur au théâtre Regina dans la rue Marietton, j’étais souffleur, pour ses pièces.

J’aimerais juste lui dire bonjour !

 

Elle: qu’est que vous voulez que ça me fasse ! Il n’a pas le temps : il ne reçoit que sur rendez-vous

 

Vladimir : et pour prendre rendez-vous il faut faire comment ?

 

Elle: un justificatif de domicile, huit dernières factures de téléphones les quittances de loyers et …

 

Vladimir: je vous arrête tout de suite je n’ai pas de logement pour l’instant, je suis chez un ami de mes parents, un monsieur très âgé qui a eu la gentillesse de me recueillir et je ne crois pas qu’il aimerait que je l’embête avec tous ces papiers.

 

Elle: mais de toute façon, ils doivent être à votre nom ! Il faudrait que vous demandiez à ce monsieur de venir avec vous !

 

Vladimir : c’est hors de question, n’y a t-il pas d’autre moyen de faire ?

 

Elle: ben non je ne vois pas!

 

Vladimir : comment vous dire, c’est lui qui m’a demandé de venir le voir, vous pourriez le prévenir que je suis à l’accueil, je suis sûr qu’il comprendra!

 

Elle: peux pas !j’ai reçu des directives ! Pas de rendez-vous ! Pas de rencontre ! Ce sont les ordres ! Et moi j’ai pas envie d’être renvoyée ou vertemancer  vous comprenez !

 

Vladimir : Oui je comprends, mais mettez vous à ma place, je n’ai pas de travail pas de logement, j’ai travaillé dans le théâtre de Monsieur Simon pour ainsi dire toute ma vie, je ne sais rien faire d’autre, Monsieur Simon m’a demandé de venir le voir si jamais je ne trouvais rien, alors je viens et là je ne peux l’approcher sans une armada de documents administratifs.

 

Elle: Donnez moi votre nom, mettez le sur un papier avec un numéro de téléphone et je verrais ce que je peux faire!

 

Vladimir: Merci, merci infiniment ! Il écrit sur une feuille et lui donne.

 

Elle: je ne vous promets rien ! Il repart on voit « elle » qui jette le papier dans une corbeille : Suivant numéro 20853

 

La lumière revient sur le théâtre

 

Vladimir : je suis trop naïf !

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Elle: trop naïf oui ! Sens-tu cette odeur ? Celle du théâtre ! Une odeur de vie, de foule qui passe, de colle, de transpiration, bientôt les étoiles dévoileront leur lueur sur les cadavres de ces murs, j’ai une douleur au ventre, mon âme s’éteint , ma tête sombre dans l’oubli, et mes mains s’effritent comme le sable dans le sabliers.

 

Lui : relaxe, regarde ! tes doigts sont encore là, ferme les yeux imagine l’océan , grand ,calme et sombre tu es sur le bateau, écoute le craquement des planches, tu vois l’orage au loin, les éclairs allument les nuages gris, cette vague immense n’est pas encore là, elle se forme très lentement sous nos pieds mais nous sommes encore vivant.

 

Vladimir: Je ne peux rien pour vous, je ne suis personne ! Juste un souffleur !

 

Elle: Mais tu aimes ces lieux !?

 

Lui: Nous ne te demandons rien, juste de savoir, tu vis ici depuis longtemps, tu es le seul qui a pu nous voir, qui croit en nous, même le public ne croit plus en rien, il se lasse, pense qu’il serait mieux au cinéma ! Nous ne voulions pas disparaître dans l’oublie. Faire nos adieu à quelqu’un qui compte.

 

Elle: C’est quoi le cinéma?

 

Vladimir: C’est comme le théâtre ! Ou presque, il y a des acteurs, des décorateurs, énormément de monde, beaucoup plus qu’au théâtre, mais l’action s’est passée il y a longtemps, ce sont des photos prises très rapidement, qui donne l’illusion d’un mouvement.

 

Elle: c’est mort ! il n’y a aucune vie ?

 

Vladimir: Oui, c’est ça!

 

Lui: Mais pourquoi les gens préfèrent le cinéma au théâtre ?

 

Vladimir: il y a souvent plus d’action et puis des effets spéciaux, c‘est spectaculaire. Le public a peur du théâtre, il pense que c’est ennuyeux.

 

Lui: Je ne comprend pas! Mais je suis sûre qu’un jour, ils reviendront nous voir.

 

Elle: quelles sont les histoires qui passent dans ton cinéma?

 

Vladimir: Le plus souvent des histoires d’amour, mais aussi des films d’action. Le dernier que je suis allé voir était une histoire de pirates. Mais actuellement ce qui marche bien ce sont les film sur la guerre.

 

Lui: et toi tu l’as fait la guerre ?

 

Vladimir: Oui je suis parti la dernière année, j’étais très jeune, tout juste majeur, c’est le souvenir le plus difficile. J’ai encore peur quelques fois de m’endormir et de me réveiller sur le champ de bataille.

 

Tout à coup on entend venant d’en haut de la musique classique, puis des bruits de pas, et des gens qui jouent, on découvre que c’est une pièce de théâtre, le public rit et parfois applaudit.

 

Lui: C’est quoi ce bruit ?

 

Elle: C’est Feydeau!

 

Vladimir: ça fait très longtemps que l’on n’a pas joué du Feydeau !

 

Lui: le public rit C’est un classique ! Celui-ci marche toujours !

 

Vladimir: Oui ce Feydeau je ne l’ai pas entendu depuis fort longtemps pour des raisons simples !

 

Elle: lesquelles ?

 

Lui: Tu le sais bien

 

Elle: Laisse-le  raconter j’aime l’entendre  nous raconter ses histoires

 

Vladimir: Un souvenir bien triste sur l’occupation.

 

 Soudain Il y a du silence les comédiens sont muets, on entend des bruits de pas plus fort sans doute des bottes, une comédienne pleure doucement, une personne s’exprime en allemand, puis en français mais avec un fort accent, il embarque la jeune fille, un comédien se rebiffe, celui ci est giflé bruyamment, le public s’indigne.

 

Lui: Suis-nous et ne fais pas de bruit, c’est juste en haut,  leurs oreilles sont bien tendues, comme des chats devant la souricière

 

Elle: Une étoile jaune qui courrait dans l’herbe, je l’attrape par la queue je la montre à ces messieurs ces messieurs me disent, trempez-la dans le gaz trempez-la dans le feu ça fera un esquimau tout chaud. Je la cache dans ma cave je la cache dans les loges elle me fait trois petites bises.

 

Lui: Sauve toi !

 

Vladimir: Mais pourquoi?

 

Lui: c’est toi qui cachait cette jeune femme dans ta loge de souffleur une juive, tu as été trahi par un de tes collègues !

 

Elle:  FUIT !ils te cherchent

 

Lui: engage toi et vite ! Part sur le front FUIT!

 

Elle:  passe par l’entrée des artistes  et prend la première ruelle à droite !

 

Vladimir: Entrée des artistes , première ruelle à droite.

 

Elle: rentre dans l’immeuble rose, troisième étage, porte gauche demande, Léon!

 

Lui : ne le regarde pas les dans les yeux, et surtout ne te fait pas remarquer, soit le plus transparent possible, il te fera partir si tu veux te battre

 

Vladimir: être transparent c’est une des choses les plus faciles pour moi.

 

Changement de lumière très, c’est la nuit dans une ruelle sombre éclairé par un lampadaire, Vladimir marche il ouvre une porte imaginaire derrière laquelle se tient un militaire avec un sac et quelques accessoires à la main, notamment une vielle radio de guerre. la lumière change , c’est celle d’un clair de lune.

 

Lui: reprend vite tes affaires le sergent est en rogne il te cherche depuis un moment je l’entends qui hurle ton nom, depuis des lustres, t’a quoi ? la courante ?

 

Vladimir:Je sais pas mais ça veut pas passer!

 

Lui: C’est la trouille, j’en ai vu plus d’un mouiller son froc, la prochaine fois tu fais sur place et tant pis pour l’odeur, je vais pas te chaperonner, j’ai ma peau à sauver, ici c’est chacun pour soit.

 

Vladimir: Pourquoi il me cherche le lieutenant ?

 

Lui: J’en sais rien mon gars, sûrement pour la radio ! T’es la radio mon vieux , tu dois coller le sergent comme si c’était ta fiancée qui était dans les tranchées.

 

Vladimir :C’est calme aujourd’hui!

 

Lui: tu crois pas si bien dire, c’est toujours calme avant la tempête ! Y’a que les bombes qui tombent quand c’est tranquille.

 

Vladimir: il regarde le ciel Le ciel est clair, c’est beau on voit toutes les étoiles.

 

Lui: regarde pas les étoiles, regarde tes pieds et avance.

 

Vladimir: il ne bouge pas ce doit être un temps idéal pour l’aviation.

 

Lui: ferme-la et avance!

 

Vladimir: toujours immobile Pas une miette de vent!

 

Lui: c’est dangereusement calme je te le dit. Avance!

 

Vladimir: immobile Il est loin mon théâtre !

 

Lui: à des années lumière

 

Vladimir: en même temps, ici c’est un peu le théâtre tous les soirs !

 

Lui: moi le théâtre ça me fait rêver alors qu’ici c’est plutôt le cauchemar

 

Vladimir prend son sac et sa radio durant tout le monologue et va lentement mettre ses affaires. Lui petit à petit repart laissant Vladimir seul.

 

Vladimir: Je ne comprend pas les hommes, un jour tu es bien dans ta peau tout va bien dans le meilleur des mondes, tu as une fiancée, des projets, un avenir, tu es bien avec tout le monde, tu rêves de voyages et de rencontres et puis tout à coup, fini, du jour au lendemain ! Pffuit! Comme ça ! ta vie bascule ! Tu as une arme dans la main des ennemis dans le cœur et si tu mets en joue tu tires, tu vois alors le sang emplir tes yeux et tes souvenirs, tu te rappelles ce que l’on t’a appris quand tu étais petit, que le crime était un pêché, puni de prison que seuls les fous tuent. Mais toi tu reçois des médailles on te félicite, pour ces crimes que tu as eu le courage de commettre, les autres te rendent fou petit à petit ce n’est pas la folie qui t’as fait tuer mais la tuerie qui t’a rendu fou, et ça seulement parce que quelques politiques l’ont décidé. Mais pendant ce temps le monde reste le même dans ce chaos, le ciel ne s’ébranle pas, les étoiles sourient leur clarté, ce n’est rien disent-elles juste un coup de vent qui agite des grains de sable.

 

BOUM ( bruit de bombe changement de lumière, deux personnes se tiennent devant une table d’opération,  sous une lampe basse un masque devant le visage, en blouse blanche ; sous un drap un corps inanimé)

 

Elle: 1,2,3 comptez avec moi!

 

Lui: pince !

 

Elle: 4,5,6 ouvrez la bouche

 

Lui: éponge!

 

Elle: Articulez! 7,8,9

 

Lui :Bistouri, Stérilisez!

 

Elle: elle passe sa langue sur la lame à 10 vous vous laisserez aller, vous oublierez tout, ce sera le sommeil !

 

Vladimir: chuchoté qu’est-ce ce qui m’arrive ?

 

Elle et Lui: Chut…. Vladimir sort de dessous la table

 

Vladimir: qui est-ce ?

 

Lui: c’est vous mon vieux !

 

Elle: encore en vie, mais c’est tout juste !

 

Lui: après l’opération tout rentrera dans l’ordre, si vous y survivez !

 

Vladimir: si j’en survis ?

 

Elle: y’a des dégâts ! C’est pas joli-joli, j’ai la rate qui s’dilate j’ai le foie qu’est pas droit etc.…

 

Lui: pas sûr, faut voir. Il sort un paquet de cartes et commence a distribuer, il n’en met pas à Vladimir mais en glisse une sous la couverture qui recouvre le corps sur la table

Le valet, la dame, le deux, le sept, le valet 8, la dame 9, le roi 10, le sept de carreau compte 1

À vous Vladimir!

 

Elle: J’ai un jeu de merde !

 

Vladimir: j’ai pas de carte !

 

Elle: c’est à vous de commencer !

 

Lui: allez mon vieux !

 

Vladimir: mais vous n’opérez plus ?

 

Elle: et on fait quoi là à ton avis ?

 

Lui: on s’amuse peut-être ?

 

Elle: J’ai vraiment un jeu de merde !

 

Vladimir: mais j’ai pas de cartes !

 

Lui: regardez mieux !

 

Elle: vous êtes perdu !

 

Vladimir: Je vais mourir ?

 

Elle: prenez vos cartes !

 

Lui: dans votre sac !

 

Vladimir ouvre son sac et découvre plusieurs cartes

 

Elle: ça dépend de votre jeu

 

Vladimir: C’est quoi ?

 

Lui: C’est quoi ?

 

Elle: C’est quoi, quoi ?

 

Vladimir: comme jeu !!

 

Lui: une Scopa !

 

Vladimir: une Scopa à trois

 

Elle: Nous sommes quatre Vladimir !

 

Vladimir: Nous sommes trois 1,2,3

 

Elle: et lui ! Là dessous !

 

Vladimir: mais c’est moi là dessous !

 

Lui: une partie de vous

 

Elle: la partie visible de l’Iceberg

 

Vladimir: je ne peux pas jouer avec moi !

 

Elle: c’est le meilleur moyen de savoir

 

Vladimir: mais il est inconscient

 

Lui: Je suis inconscient

 

Vladimir: vous aussi ?

 

Lui: Non !Vous ! vous êtes inconscient

 

Elle: de savoir pourquoi !

 

Vladimir: savoir quoi ?

 

Lui: mauvaise réponse

 

Elle: il est innocent comme un ver de terre sur une plaque de béton

 

Lui: il est con oui ! Comme une maison sans fondement ou une indigestion sans ballonnement

 

Vladimir: Je vous en prie !

 

Lui: Jouez!

 

Vladimir: et puis savoir ! Oui mais savoir quoi ?

 

Lui: je commence ! Je prend le Valet !

 

Elle: alors…. elle regarde le jeu du Vladimir sous le drap vous posez un as de cœur !

 

Vladimir: je joue avec lui vous n’avez pas le droit de regarder son jeu !

 

Elle : à moi ! Donc … Je prend la dame de trèfle !

 

Vladimir: SAVOIR QUOI ?

 

Elle: si vous allez vivre ou mourir ! Mourir ou vivre !ou inversement !

 

Vladimir: et ça se joue aux cartes ?

 

Lui: il faut croire que oui ! C’est à  vous ! Jouez !

 

Vladimir: je prend le deux, le sept et l’as avec mon roi de carreau et je fais une Scopa !

 

Elle: et bien tu vois , ce n’est pas si difficile de vivre

 

Lui: il suffit d’avoir les bonnes cartes en main !

 

Elle: et de savoir à quoi tu joues !

 

Vladimir: mais vous m’avez laissé gagner !

 

Lui: ne crois pas cela !

 

Elle: la partie est finie

 

Vladimir: Déjà ?

 

Elle: Elle t’a paru courte mais pour nous elle fut longue et douce !

 

Lui: Nous voulions te rencontrer Vladimir, juste le temps d’une nuit, nous voulions partager avec toi un bout de notre univers, et te dire au revoir!

 

Elle: il faut partir maintenant ! Nous ne reviendrons pas Vladimir, nous faisons ce soir nos adieu au théâtre.

 

Lui: Nous préférons partir avant le grand chaos, il faut y aller maintenant , la nuit est presque finie !

 

Vladimir: partir où ? vous voulez dire mourir ?

 

Lui : Nous ne sommes pas vraiment vivant nous ne pouvons pas tout a fait mourir

 

Elle : Mais c’est presque ça !

 

Vladimir : non ! ne partez pas  j’ai des choses à vous demander !

 

Lui: trop tard j’entend le bruit du rappel

 

Brusque changement de lumière, nous sommes sur un bateau en pleine tempête, les personnages grimpent sur des parties du décor il sont ballottés par l’océan.

 

Vladimir: c’est pour quand la destruction du théâtre ?

 

Lui: ce bruit ! Vous entendez ? un raclement, C’est la vague qui arrive ! Matelot ?

 

Vladimir c’est pour quand la……. Il essaye de parler mais aucun son ne sort de sa bouche

 

Elle: Oui mon capitaine ?

 

Lui: descendez la grande voile !

 

Elle: Bien mon capitaine !

 

Lui: lui ligote les mains alors mon vieux, on fait de la résistance !  Tu n’as pas encore vomi tous tes boyaux ! Si tu ne réponds pas gentiment, tu seras passé par dessus bord.

 

Vladimir:…….

 

Elle: il a l’air surpris ! On t’a coupé la langue ! chantonné Tu vas passer par dessus bord ! Tu vas passer par dessus bord !

 

Lui: l’océan est déchaîné aujourd’hui ! Tu as peur ? On te libèrera les mains! Tu pourras nager !

 

Vladimir:…

 

Lui: Oui évidemment la vague énorme !

 

Elle: chantonne elle va l’emporter ! Elle va l’emporter, comme une bouteille ballottée par la mer, comme un message sur le sable humide, comme un cri dans le désert !

 

Lui: Une dernière volonté ?

 

Vladimir:…

 

Lui: Quoi ? Plus fort je ne t’entends pas !

 

Elle: Le bruit de la vague est trop violent mon capitaine, il faut virer sinon nous ne passerons pas !

 

Lui: un pirate passe! ou trépasse! Nous passerons, nos coffres sont pleins de l’or des rêves, des vies meilleures nous attendent de l’autre coté.

 

Elle: le vent mon capitaine, le vent tourne, il souffle dans tous les sens !

 

Lui: monte sur le pont, dis-moi ce que tu vois et ensuite défait les artimons

 

Elle: la mer n’est plus agitée ! Elle est calme comme un lac, mais je vois le monstre gonfler et devenir plus fort

 

Lui: tu as peur petit ?

 

Elle: non Mon capitaine! Un pirate n’a jamais peur !

 

Lui: Bonne réponse jeune et vigoureux pirate!

 

Elle: On passe ou on crève ! J’étais heureux de naviguer avec vous mon capitaine ! Vous êtes le plus courageux et le plus cruel des pirates avec qui j’ai vogué, je suis heureux d’être ici avec vous, et si je doit mourir c’est un honneur de crever la gueule ouverte avec un homme comme vous.  Voilà mon capitaine! C’est comme que j’vous dis !

 

Lui: tu as vu ça ? Tu réfléchis maintenant ! Tu sais avec qui tu t’es embarqué  ! Alors rigole mon gars, tu vas peut-être pas mourir tout de suite, t’as de la chance que j’tai pas ouvert en deux couic d’un bout à l’autre.

 

Elle: nous arrivons au bas fond mon capitaine ! La vague retire l’eau sous le bateau nous allons  toucher le sable.

 

Lui : bientôt nous ne pourrons plus avancer ! Mais pour l’instant c’est encore possible. Allez viens ! la mer ! viens me cueillir, j’ai pas peur de toi !

 

Elle: la vague est énorme elle doit bien faire dans les cinquante pouces ! C’est un vrai monstre !

 

Lui: tu as peur !

 

Elle: non mon capitaine, un peu la tremblote  peut-être, mais je vais me calmer !

 

Lui: continue, nous ne sommes plus qu’à combien d’elle ?

 

Elle: quelques dizaines de mètres !

 

Lui: allez, viens me voir ma grande, tu vas voir à qui tu as affaire! Viens ! VIENS  !

 

Elle: adieu mon capitaine !

 

Lui: a dieu

 

 La lumière redevient celle du théâtre , Vladimir est blotti dans un coin, il a les yeux fermés serre les poings, il affiche un visage terrorisé. très lentement il  ouvre les yeux  se les frotte ,il fouille dans sa poche et découvre la lettre, cherche Lui et Elle, ne sait plus ou il est. Reste seul au milieu du plateau. Petit à petit range les costumes et les accessoires, regarde sa montre il fait mine d’attendre l’arrivé des comédiens, la lumière redescend petit à petit

 

Fin alternative

 

 

Vladimir: j’ai rêvé ? Je ne sais plus (il fouille dans sa poche et découvre la lettre) cette vague ? j’ai cru mourir, les rêves ne sont jamais aussi intenses, vous êtes encore là ? Je ne connais pas vos noms, vous ne m’avez pas dit vos noms, j’ai voyagé dans un rêve, moi qui pensais que je ne bougerai jamais d’ici, c’est d’ici que le voyage fut le plus extraordinaire, (il parle dans le vide s’adressant aux murs) Je n’oublierai jamais qui vous êtes, je ne sais pas si j’ai rêvé, peut-être ma raison me joue t-elle des tours, c’est ici que finit votre histoire, c’est ici que commence la vérité sur un théâtre en ruine, vous ne mourrez jamais, le cœur des hommes aura toujours besoin de s’endormir rassuré par les récits des conteurs, il aura toujours assez de place pour sentir frémir  l’aventure de ses frères , il aura les yeux suffisamment ouverts  pour sentir l’humidité de ses larmes sur les mots des autres.  je serais présent de ce lieu jusqu’à sa fin.

 

Vladimir range doucement les costumes remet en place les accessoires, il prépare l’arrivée des comédiens, regarde sa montre, continue de remettre en ordre la lumière s’éteint petit à petit

 

FIN

 

 

 

 

   

 

 

 

 

 

 

Pour Zébulon et Liloïa

 

à l’ombre du cactus

 

Roland Bideau

 

 

Comédie de 60 minutes tout public à partir de 4 ans

 

 

 

Personnages

 

GUSTAVE  dit GUS entre 25 et 50ans et Poul

 

ALBERT dit AL entre 25 et 50 ans et Pil

 

DIDY entre 25 et 50 ans

 

 

GUS et Al sont des clowns,  dans un coquillage ils découvrent une carte leur indiquant  la direction d’un mystérieux cirque étoilé, soit disant le plus grand cirque de tout l’univers. Ils décident de partir le trouver, ils vont alors faire une rencontre en plein milieu du désert.: DIDY une jeune femme clown..

 

 

GUS et AL ont un univers très riche et très coloré, Gus est le plus malin tendis que Al est un grand naïf, comme dans le cirque traditionnel.

 

DIDY, est une danseuse et chanteuse charmeuse d’animaux et d’insectes, elle est  poète. Son costume est très différent, elle vient d’un autre pays.

 

Al et Gus sont très chargés, ils portent de grands sacs et de nombreux plus petits de toutes les couleurs Al a des chaussures de clown très grandes et très brillantes, ils sont maquillés presque comme des clowns, des bâtons du diable, des balles de jongle et autres accessoires dépassent de toutes parts.

 

Décors : deux ou trois cactus très colorés et de forme très originale meublent l’espace, ainsi qu’un rocher central de forme vaguement ronde.

 

AL : On est bientôt arrivé ?

 

GUS : je ne sais pas, il faut que je regarde

 

AL :  j’ai mal aux pieds !

 

GUS : Pourquoi t’as mis ces chaussures aussi !

 

AL : Parce que je les aime ! elles brillent comme une pièce d’or, un beau Louis tout doré ! en les regardant, je vois les étoiles qui se reflètent et quand je marche, ça fait comme des étoiles filantes.

 

GUS : Ce ne sont pas des chaussures de marche ! C’est pour la scène pas pour la route.

 

AL : je sais ! Demain je changerai ça me manque de ne plus être sur scène.

 

GUS : moi aussi .

 

AL : regarde les étoiles !  Imagine  que ce sont des milliers de projecteurs et que tous les cactus soient nos spectateurs ! elle est pas belle la vie ?

 

GUS : piquants les spectateurs !

 

Al : Je n’en peux plus il faut qu’on s’arrête. J’ai mal aux pieds, aux doigts, au dos, aux genoux, j’ai le  pied gauche qui me démange, le genou qui se plie plus et les yeux qui voient trouble.

 

 

 

 

 

Chanson  

 

J’en peux plus c’est quand qu’on arrive !

J’ai les doigts, les doigts de pieds qui enflent,

 le dos qui se démantibule,

les genoux qui se désarticulent

 je crois bien  que je vais m’écrouler

que mes pieds n’veulent  plus avancer

 

 C’est trop loin, c’est quand qu’on arrive !

Je me lasse des chemins, des routes !

J’en peu plus de tous ces baguages !

C’est trop lourd et trop  fatiguant !

Je ne peux plus d’un mètre avancé

J’en peux plus j’ai les  pieds collés

 

Dit le moi C’est quand qu’on arrive !

Je suis épuisé de marcher

J’ai le ventre tout barbouillé

Et mes deux guibolles  épuisées

Mon  sac de mes épaules va tomber

Et  mon corps d’un coup va s’écrouler

 

J’ai mal, j’ai mal , j’ai maaaaal

 aux pieds, aux dos, aux mains, aux épaules, à la tête,

 aux genoux, aux mollets,  aux yeux, aux coudes, aux bras,

au poignets, au ventre, aux mains, aux doigts, au nez  et même aux cheveux 

 

GUS : ok, ok, ok stop ! D’accord ! OK  ! Tu as raison, moi aussi je suis fatigué, mon sac est lourd, j’ai le dos en marmelade, on pose tout et je regarde où on est.

 

Al : En plus j’ai une faim de loup,

je me repose une seconde et  je prépare la tambouille !

 

Gus sort plusieurs appareils étranges pour repérer les étoiles, il les installe avec une grande rapidité les pose sur toute la scène, passe par-dessus Al. Bientôt l’espace est complètement occupé par tous ses accessoires, Gus se retrouve empêtré dans tout se fourbi, on sent que ça l’énerve mais il est habitué et ne dit rien, chaque mouvement est gêné par l’énorme construction de Al.

GUS : Pour l’étoilomètre, c’est à gauche du grand capricorne. Pour le capteur de voix lacté c’est sous la grande casserole…

 

Al : cherchant dans son sac tous les ustensiles de cuisine  tiens ! justement, moi,  je ne retrouve plus ma petite casserole.

 

GUS : tu peux me passer, un petit caillou ! pour  caler le pied du desobscurisium

 

Al : ramasse un caillou ils sont drôle ses cailloux, tout comme le paysage, c’est de plus en plus étrange ici !  j’en ai trouvé un très joli : il a plein de reflets de toutes les couleurs, regarde !

 

GUS :  passe-le moi ! Il est bien trop petit, je m’en charge, tiens, pose ton doigt ici et ne bouge plus ! Gus a le doigt coincé sous l’obscurisium il ne peut plus bouger, il est dans une posture peu confortable Al prend tout son temps

 

AL :  je ne peux plus bouger ?

 

GUS : non surtout pas !!

 

AL : je commence à avoir des fourmis dans les mains !

 

GUS : attend ! il me faut la pierre idéale, ni trop grande ni trop petite, c’est vrai que le paysage est vraiment de plus en plus bizarre, c’est surement par ce que l’on arrive bientôt.

 

AL :  vite ! j’ai des petites bêtes qui me montent sur le bras !

 

GUS : mais non c’est juste une sensation, on appelle ça, avoir des fourmis, c’est parce que tu ne bouges pas et que ton sang ne circule plus dans ta main !

 

AL : Non, non ! J’ai vraiment une petite bête qui me monte sur le bras. Elle a des petites antennes qui me chatouillent, fais vite je ne pourrai pas tenir longtemps.

 

GUS : tiens !  Voilà la pierre parfaite ! Regarde, elle aussi a des couleurs fantastiques !

 

Al : Vite je t’en supplie……. Ah ! Merci…. Se recule comme très effrayé ! Je t’assure, elle a une drôle de bobine cette petite bête ! Il revient sur ses pas  Regarde elle est là !

 

GUS : Moi je la trouve plutôt rigolote.

 

AL : A la regarder de plus près, c’est vrai qu’elle est plutôt marrante, il se rapproche de plus en plus du sol salut toi ! Ça va ? Alors qu’est-ce que tu fais dans les parages ? haaaa  se recule vivement ! Elle a voulu me monter sur le nez.

 

GUS : très concentré sur son travail il ne fait même plus attention à Al je pose la lumière de soleil sous la fenêtre du désert, et hop ! ! Quelques poussières d’étoile polaire et le tour est joué !

 

 

Al : Bon aux fourneaux il retourne à son sac très méfiant de tous les insectes qu’il pourrait apercevoir la grande louche ! J’ai ! Mes deux petites casseroles ! J’ai ! Le sel, le poivre et la cannelle ! J’ai ! Des herbes magiques de ma grand-tante Léonie, J’ai ! Et enfin  les deux boîtes, épinards, cresson ! et …

 

GUS : Oh non ! Pas des épinards !

 

AL : Moi j’adore ça ! C’est plein de bonnes choses, comme du fer, avec ça tu recharge te batteries, tu peux marcher plus longtemps par contre je n’ai toujours rien trouvé pour le mal aux pieds !

 

GUS : change de chaussures !

 

AL : Je sais ! Si t’en veux pas je mange les tiens !

 

GUS : Et tu fais quoi avec ?

 

Al : De la soupe de cresson !

 

GUS : Alors pour moi ce sera, une double ration de soupe de cresson  et juste une mini toute rikiki cuillère d’épinards !

 

Al : Alors ? On est où ?

 

GUS : J’en sais encore rien, il y a des nuages, je ne peux pas voir toutes les étoiles !

 

Al : Bon ! pendant que ça chauffe, aide moi à chercher les petites baies si bonnes que l’on a mangé l’autre jours, pour notre dessert !

 

GUS : verte et rouge ? Fondantes et sucrées ! Le premier qui en ramène trois branches ne fait pas la vaisselle.

 

AL : Top là !

 

Ils sortent

Rentre les deux gerbilles (marionnettes à main)qui sortent d’un gros rochet qui se trouve au milieu de la scène

 

Gerbille 1 : C’est qui ceux la ?

 

Gerbille 2 : des drôle de bestioles ! Jamais vu des créatures aussi bizarre !

 

Gerbille1 : Mais qu’es ce qu’elles font à ton avis !

 

Gerbille2 :j’en sais rien peux être qu’elles viennent comme l’autre, tu sais celle qui à toujours le nez dans les étoiles !

 

Gerbille1 : ça sens pas bon ! c’est quoi à ton avis !

 

Gerbille2 : à mon avis c’est de la crotte de gazelle séchée !

 

Gerbille1 : regarde cette appareil ! c’est un truc plutôt étrange.

 

Gerbille2 : Je crois plutôt que c’est leur repas !

 

Gerbille 1 : Beurk !! il le brule sur du feu,

 

Gerbille1&2 : Immonde ! hahahahaha

 

Gerbille  2 : et ça regarde c’est très grand ! ça se mange tu crois ?

 

Gerbille 1 : Aie !! non c’est plutôt dure ! comme des cailloux.

 

Gerbille2 : regarde la dedans !! des objets encore plus amusant …

 

Gerbille : 2 Chut !  les voilà qui reviennent.

 

Al :  Et de trois ! tu ne devrais pas jouer à des jeux comme ça avec moi tu sais que j’ai un œil de linx. A toi la vaisselle au sable !

 

GUS : gna gna gna

 

AL :!ça chauffe bien ! pas trop de vent ce soir ! Ce sera prêt dans quelques secondes.

 

GUS :Ils sont de plus en plus étrange les cactus ici !

 

Al : Je les trouve amusant !

 

GUS : ça sens bon par ici !

 

Al : tien je croyais que tu ne voulais pas d’épinards !

 

GUS : et bien j’ai changé d’avis ça a l’air vraiment  délicieux ! Et je suis affamé.

 

Al : alors à table !

 

Ils se mettent à table enfilent des serviettes à gros carreaux se munissent de grosses cuillères (tout est un peut disproportionné Al prend la plus grosse assiette ce qui à pour effet de contrarier Gus ; tout le repas doit être drôle et plein de petits jeux de passe-passe entre le sel, l’eau, les épices etc…

 

 

Jeu de passe-passe

 

GUS : du sel

 

AL : le poivre

 

GUS : les épices

 

Al : c’est bon

 

GUS : C’est chaud ! Mais ça fait du bien !

 

AL et GUS : entonnent une chanson tout en mangeant

C’est bon de se remplir le ventre

De bien manger de mastiquer

A pleine fourchetées à pleine cuillerées

 

C’est bon de boire un grand verre d’eau

Surtout quand elle est bien glacée

A petites gorgées jamais sans se presser.

 

C’est bon de se remplir la panse

De bien humer de savourer

A pleine cuillerées à pleine fourchetées

 

C’est drôlement bon un beau dessert

Avec du miel sur un fruit sucrée

à pleine dents ça fait tout digérer

 

GUS : Ce n’était pas si mauvais finalement, tu es vraiment un chef ! Haaaa il baille et s’étire j’ai sommeil, c’est difficile de marcher la nuit quand tout le monde rêve. Les étoiles sont encore cachées par de gros nuages, je crois que je vais dormir un peu. Tu regardes le ciel et si les nuages s’en vont, tu me préviens.

 

Al : Mais moi aussi j’ai sommeil. Et tu dois faire la vaisselle

 

GUS : je la ferais après un petit somme

 

Al : tu plaisante !! j’ai autant besoin de me reposer que toi

 

GUS : J’ai le sac le plus gros c’est donc moi d’abord.

 

AL : J’ai fais le repas, et ton sac n’est pas plus gros que le mien !

 

GUS : tu es plus jeune que moi,  plus résistant, c’est donc normal que le plus vieux se repose !

 

Al : tu veux rire nous avons deux jours d’écart, tu es né le 6 je suis né le 8 du même mois et de la même année !

 

GUS : ça n’empêche que je suis le plus vieux !

 

Al : je ne suis pas d’accord, on tire au sort ou on fait plouf-plouf !

 

GUS :Plouf-plouf ?Tu as toujours plus de chance que moi, non ! je te propose une petite partie de «cric cuit »

 

Al : d’accord, je suis imbattable dans ce jeu ! A moi la sieste

 

Ils jouent à un jeu que seul eux connaissent, un jeu qui utilise les mains mais aussi les pieds et les sons, c’est amusant et très original, GUS gagne c’est donc Al qui reste adossé aux sacs, le nez dans le ciel

 

GUS : n’oublie pas de me réveiller s’il y a une éclaircie !

 

AL : gna gna gna gna gna gna  il boude, Il s’amuse un peu avec des balles de jonglage et quelques accessoires qu’il a emmené, puis petit à petit il s’endort, on ne le voit plus il est caché par les énormes sacs . plus personne ne peut voir GUS et AL, dans un coin une fille regarde mais ne fait pas de bruit pour ne pas se faire remarquer, elle les observe

C’est toujours moi qui me tape les corvées, si je dors cinq minutes ça ne devrait pas se voir ! Allez, je ferme juste les yeux pour me les reposer ! juste Vingt secondes 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, ….10….11….22…ronfle rrrronnononfffffffll

 

 

DIDY qui les surveille depuis un moment arrive et farfouille dans leurs affaires, elle est très habile et marche au pas de chat elle regarde le ciel et s’aperçoit qu’il n’y a plus de nuages elle se précipite sur la machine de GUS pour voir où elle est, elle ne comprend pas, alors regarde dans son appareil de mesure à elle qui est beaucoup plus petit, elle a l’air contente et continue de farfouiller dans les sacs, à ce moment là les deux marionnettes se réveillent…..

 

DIDY : elle chantonne une chanson douce venue d’un autre  pays « voire berceuse du monde »

 

Gerbille 1 : C’est qui ?

 

Gerbille 2 : Mmf c’est quoi ?

 

Gerbille1: Réveille-toi, regarde c’est elle!

 

Gerbille2  : Qui elle?

 

Gerbille 1 : la drôle de fille qui à toujours le nez dans les étoiles.

 

Gerbille 2 :Qu’est-ce qu’elle  fait ?

 

Gerbille1 : je ne sais pas ? On dirait qu’elle cherche quelque chose  !

 

Gerbille 2 : Elle n’est pas gênée ! Celle la

 

Didy : ho ! Moi ?

 

Gerbille1 : Elle nous entend ?

 

Didy : bien sûre que je vous entends ?

 

G2 :Tu parles notre langage ?

 

Didy :Oui et plein d’autres encore

 

G1 : Et que fais tu ici en plein milieu du désert ?

 

Didy :Rien je passais par-là !

 

G2 :Tu passais par là ?

 

Didy : ben oui je me promenais !

 

G1 : et tu farfouilles dans ses drôles d’affaires?

 

Didy : Je ne fouillais pas ! ……..Je….Je cherchais Manou

 

G1 : Manou c’est qui ça

 

Didy : c’est pas un homme, c’est un papillon

 

G2 : un papillon ?

 

G1 : y’a pas de papillon ici

 

Didy : Si, si, il y en a un c’est  mon compagnon de cirque Manou buterfly

 

G2 :dans le désert ?

 

Didy : Oui, il m’accompagne partout, il a été attiré par la lumière !

 

G1 : quelle lumière ?

 

Didy : celle du campement ! Il aime la lumière, alors dès qu’il en voit une, il s’agite et il fonce dessus !

 

G2 :il est bizarre ton papillon !

 

Didy : c’est un papillon extraordinaire !

 

G1 : Je ne la crois pas !

 

G2 :tu as raison, c’est une drôle d’histoire !

 

Didy : mais c’est la vérité ! Je voyage la nuit et la seule lumière que l’on voit mon papillon et moi, c’est celle des étoiles et de la lune ! il a même essayé d’y aller !

 

G1 : Où ça ?

 

Didy : sur la lune !  mais elle est si loin ! la seule fois où il a cru la toucher, cette coquine s’est cachée derrière la ligne de l’horizon et les étoiles sont trop petites pour pouvoir se poser dessus, alors quand il a vu la lumière du feu il a foncé directement dessus, il faut dire qu’il fait froid la nuit par ici,  je pense qu’il a voulu se réchauffer les pattes

 

G2 :Se les brûler tu veux dire ! ! Ha ! Ha !  Ha !

 

Didy : ho non ! Ne dites pas cela ! Je l’aime moi !

 

G1 : ne soit pas triste ! tu vas sûrement le retrouver

 

Didy : ça fait un moment que je l’ai perdu de vu, il ne tient pas en place, c’est un papillon de jour, pour rester avec moi et me faire plaisir il vole la nuit.

 

G1 : comment il est ton papillon ?

 

Didy : il a les sept couleurs de l’arc-en-ciel, c’est un papillon de cirque, avec lui je fais des numéros d’acrobaties

 

G2 :tu entends ? Des numéros ! !

 

G1 : de cirque ? c’est quoi ça le cirque

 

G2 :c’est étrange !

 

G1 : surprenant !

 

Didy : il est très amusant, il passe à travers des anneaux de feu, il marche sur des fils, fait du trapèze et des cabrioles parfois quand il va très vite on croirait voir un vrai arc-en-ciel.

 

G2 :Ce doit être magnifique !

 

Didy : vous ne l’avez pas vu ?

 

G2 :et G1: Nous avons vu beaucoup de chose !

 

G1 : Des lucioles !

 

G2 :des criquets !

 

G1 : des chauves-souris !

 

G2 :et même des scarabées volants !

 

G2 et G1::Ils chantent une petite chanson sur le thème on n’a vu

depuis que l’on est grand On croise de drôles de choses

dans notre désert sur ce gros cailloux On observe et on admire

On a vu des escargots qui portaient  des chapeaux

On a vu des chameaux qui avaient mal au dos

On a vu des oiseaux qui  jouaient aux legos

On a vu des fourmis qui se faisaient des mimis

On a vu des sauterelles qui jouaient à la marelle

On a vue des poissons qui faisaient du basson 

On a vu des araignées qui se mélangeaient les pieds

On a vu des serpents qui jouaient à Peter Pan

Mais jamais on ne t’a vue

 

 

 

 

 

…..ni toi ni ton Papillon…

 

G1 : jamais je n’ai vu un papillon arc-en-ciel !

 

Didy : C’est un coquin et un farceur ! Mais je suis si seule par ici que sans lui je suis perdue ! Je crois qu’il avait envie de volé un peu en solitaire.

 

G2: Mais que fais-tu ici, avec un papillon ?

 

G1 : tu marches la nuit ! Pourquoi ?

 

Didy : Pour voire les étoiles. Elles seules  peuvent  m’indiquer la bonne direction. Je croie y être arrivée et j’attends le passage de la comète c’est elle qui indique le lieu exact du cirque.

 

G2 : tu entends ?

 

G1 : un cirque ! C’est très intéressant !

 

G2 : ça ressemble à quoi un cirque ? ça se mange ?

 

Didy :ça ne se mange pas j’ai  une  petite carte qu’il faut lire avec une  loupe, j’ai mis longtemps à comprendre comment elle marchait, mais j’ai finalement compris que seule l’obscurité de la nuit  faisait donnait une direction  « A la lueur de la lune dans l’ombre d’un  cactus tu verra scintiller une lueur  filler à toute allure, elle te guidera vers le chemin  des étoiles du cirque » voilà ce qui est marqué sur ma carte.

 

Gerbille 2 : et ça a quelle gout le cirque

 

Didy ; le gout du bonheur

 

Gerbille 1 : et c’est bon ça le bonheur ?

 

Didy : mais on ne peu manger du cirque, on le regarde et il nous fait rêver, c’est tout.

 

Gerbille2 : Bho !! Alors si on ne peu le manger je n’en vois pas l’intérêt, ça ne sert à rien.

 

Didy : il n’y a pas que manger dans la vie, il y a aussi les rêves les espoirs, les joies le rire.

 

Gebille2 ; Ah moi j’aimerais savoir  rire.

 

Didy : et bien tu vois le cirque ça peut te fait rire.

 

Gerbille 1&2 : haaaa ! D’accord.

 

Didy : bon je dois chercher mon papillon

 

Gerbille1 : et nous on doit chercher des baies rouge et bleu, on en avait quelques unes en réserve mais ces dernières ont disparue.

 

Didy : bon courage.

 

Gerbille2 : a toi aussi !

 

G1 et G2 disparaissent

 

 Al: Non Non ce n’est pas possible je ne sais pas monter sur un fil, je suis clown ?

 

GUS : réveille toi, tu fais encore ce rêve

 

Al : hein ? Moi un rêve ? Heu non ! Je ne rêvais pas je pensais tout haut

 

GUS : Bien sure !!  Tu devais rester debout à surveiller le ciel, tu es vraiment incorrigible Al !  Haaa ! Je dormais bien ? On ne voit que sa tête qui apparaît

 

! Il se précipite sur sa machine vérifiant que rien n’a bougé et regardant dans une lunette de télescope.

 

Al : Regarde ! Il y a une fille !

 

GUS : Il y a peut-être eu une éclaircie pendant qu’on dormait, maintenant par ta faute il va falloir attendre, peut-être plus longtemps que prévu, le ciel il est rempli d’épouvantables gros nuages.

 

AL : Je te dis qu’il y a une fille

 

GUS : non mais regarde ces gros nuages qui arrivent sur nous, Ah ! Et bien on est pas prêt de voir les étoiles, moi je te le dis.

 

AL : Et moi je te dis qu’il y a une fille.

 

GUS : Quoi, Une fille ! Il l’aperçoit enfin sacré non d’un petit bonhomme il y a une fille au milieu de nos affaires !

 

AL : Bonjour !

 

DIDY : Bonjour

 

Al : Ben dit quelque chose GUS

 

GUS : heu ! ! Oui….. Jour !

 

DIDY : ou plutôt bonsoir !

 

Al : très intimidé limite bégaiement C’est vrai hé, hé il fait nuit, alors bonsoir !

 

GUS : Mais qui êtes vous ? Un rêve !

 

Didy : votre collègue vous la dit, je suis une fille ! et vous qui êtes vous ?

 

AL :Mais vous faites quoi dans le dessert ?

 

DIDY :Je me promène

 

AL :Ah bon comme ça vous vous promenez, au beau milieux de nulle part !

 

DIDY :On n’est pas nulle part !

 

GUS :A oui est on est où d’après vous ?

 

DIDY :Au milieux du désert de la catarzia à 85° et 254 tiret

 

AL :Hein ?? a oui ! ?

 

GUS :Mais ils sont où les autres ?

 

DIDY :Qu’elles autres ?

 

AL :Vos compagnons de route

 

DIDY :Je voyage seule !

 

GUS :Seule !

 

AL :C’est pas possible !

 

DIDY :Ah bon et pourquoi ?

 

AL :Vous êtes toute freluquette, vous ne pouvez pas voyager seul en plus vous êtes une femme !

 

DIDY :Tien quelle drôle de logique !

 

AL :Ah oui et pourquoi ?

 

DIDY :Vous ne pouvez imaginer que moi une femme je ne puisse traverser seul le désert !Vous l’avez bien fait vous.

 

GUS :Mais nous on est des hommes !

 

DIDY :Et alors ?

 

AL :On est plus costaux que vous on a plus d’endurances je ne sais pas moi , aide moi toi au lieu de ne rien dire !

 

DIDY :Et bien voyez comme vous pouvez le voire aussi freluquette que je suis-je l’ai fait !

 

GUS :Et vous venez souvent toute seule dans le désert ?

 

DIDY :Non c’est une première !

 

AL :Et pourquoi le désert

 

DIDY :J’ai mais raisons ! et vous ?

 

GUS :Nous aussi !

 

DIDY :Très bien alors bon vent

 

GUS :On est des clowns !

 

DIDY :Vous ?

 

AL :Oui pourquoi ? ça vous défrises ?

 

DIDY :Non c’est plutôt amusant !

 

GUS :Oui c’est notre métier d’être drôle.

 

DIDY :Je ne disais pas cela pour cette raison.

 

GUS :On cherche quelque chose !

 

AL :Mais tais toi

 

GUS :Mais pourquoi elle sait peut-être ou il se trouve.

 

AL :N’importe quoi ! c’est une femme !

 

GUS :Et alors c’est quoi ton problème, on ne sait pas où on est ! elle si !peut-être qu’elle connais d’autres choses que l’on ignore.

 

AL :Ben voyons !

 

GUS :On cherche un cirque !

 

DIDY :Vous aussi alors.

 

AL :Par ce que vous êtes ici pour ça !

 

DIDY :Oui !

 

AL :Vous êtes quoi danseuse ! équilibriste ?

 

DIDY :Non, je  suis juste un clown comme vous !

 

GUS : un clown ? C’est pas possible !

 

DIDY : Et pourquoi ?

 

AL : Parce que une fois de plus  vous êtes une fille !

 

DIDY : Et alors ?

 

AL : les filles ne sont pas clowns, d’ailleurs on dit un clown et pas une clown

 

DIDY : Vous dites n’importe quoi ! Pourquoi les filles ne pourraient pas être clown ?

 

GUS : Elles font plein d’autres choses, acrobates, danseuses, contorsionnistes, dresseuses d’animaux, assistantes de magiciens, mais pas clown.

 

DIDY : Et bien chez nous, on est clown de mère en fille depuis six cent ans !

 

GUS : depuis six cent ans ? Impossible !

 

AL : Impossible ! On connaît tout les clowns de notre pays !

 

DIDY : Mais je ne viens pas d’ici , j’ai traversé les grandes étendues d’eau pour venir jusqu’ici. Mon pays s’appelle Izard Là-bas il n’y a que les femmes qui sont clowns.

 

GUS : connais pas ton pays, et toi Al ?

 

Al : Moi non plus, connais pas ! Un pays où les femmes sont clowns, c’est n’importe quoi !

 

DIDY : Et pourquoi ? C’est aussi stupide qu’un pays où il n’y a que les hommes qui sont clowns !

 

Al : Bof !  il est contrarié hausse les épaules et prend un air boudeur

 

GUS : et que faites-vous ici au milieux de nos sacs !

 

DIDY : je cherche mon papillon, vous ne l’auriez pas vu par hasard, il a disparue depuis un moment et j’ai peur qu’il ne lui soit arrivé malheur  elle se met à sangloter

 

Al : Ho non ! Elle pleure ! Moi ça me fait toujours de la peine quand quelqu’un pleure !

 

GUS : Allons mademoiselle ! Ne soyez pas triste, on va le retrouver votre papillon ! Dès que les nuages seront partis et que je pourrai savoir où on est, c’est promis, on vous aidera à le retrouver !

 

Al : ça c’est bien parlé ! Moi je m’appelle Alfred, AL pour les intimes et lui c’est Gustave tout le monde l’appelle  Gus

 

GUS : il faut juste que le ciel s’éclaircisse.

 

DIDY : Moi c’est Didy !vous voyagez la nuit ?

 

AL : Oui ! Pourquoi ? Toi aussi ?

 

DIDY : Si je veux arriver à lire ma carte je suis bien obligée.

 

GUS : Ta carte ? Montre-la moi !

 

DIDY : Non !

 

GUS : moi aussi j’en ai une ! il va chercher un grand coquillage dans lequel il y a une grande carte

Regarde, tu vois, je te la montre alors fait pareil, montre-moi la tienne !

 

DIDY : la voici !

 

GUS : mais elle est toute petite ! C’est la même que la notre en tout petit !

 

DIDY : c’est impossible ? ! Comment avez vous eu cette carte ?

 

Al :Et toi comment l’a tu eu

 

DIDY :Vous d’abord !

 

AL : c’est une longue histoire !

 

DIDY :Mais j’ai tout mon temps

 

GUS :Une histoire inimaginable, mais vraie !

 

AL :Un coup de chance !

 

GUS : tu veux qu’on te la raconte ?

 

DIDY : j’aimerais bien

 

AL : alors assied-toi et écoute. Raconter, c’est une chose  qu’on aime bien faire. Gus sort les marionnettes ! Dans notre pays nous avons des marionnettes pour raconter des histoires, je vais jouer mon propre rôle, et Gus fera les autres personnages.

 

GUS : C’étais un jour de disette, nous étions arrivés au terme de l’hiver et de nos économies, comme tu dois le savoir pour nous autres les clowns c’est au printemps que les affaires reprennent avant il fait trop froid et les frileux ne sortent ni leur nez ni leur porte-monnaie au dehors.

 

AL : Nous avions en poche un tout nouveau numéro qui devait nous assurer un bel été, Je me rends donc au marché avec en main les derniers sous du cochon.

 

GUS : J’étais chargé de ramasser des herbes aromatiques dans notre petit jardin que le gel avait rendu presque désert

 

AL : Je me rendais donc au marché, je longeais les bords du port en regardant les grands bateaux quand tout à coup j’entends quelqu’un siffloter gaiment, c’était Anguerrent  le marin qui attendait sur sa barque les clients curieux .

 

 Gus sort la marionnette du marin

 

GUS en Marius : Alors le clown on cherche des choses extraordinaires ?

 

AL : je vais faire mon marché ! Si je peux une ou deux carottes et peut-être un choux avec du lard, si les prix n’ont pas trop augmentés

 

GUS en Marius : dit moi le clown, tu aimerais que je te montre ma dernière trouvaille ?

 

AL : pourquoi pas, J’aimerais bien ! C’est quoi ?

 

GUS en Marius : quelque chose que t’as encore jamais vu, je l’ai acheté à un vieux pirate qui l’a trouvé dans une salle aux trésors, sur une petite ile isolée à l’ouest du pacifique entre les rochets et les vagues gigantesques du 3eme rugissant.

 

Al : à un pirate ?

 

GUS en Marius  : A un pirate ! Comme je te le dis le clown, il avait l’air tout heureux de me voir, il faut dire qu’il était tout seul sur son grand bateau et qu’il n’avait pas vu grand monde depuis au moins cent cinquante ans !

 

AL : cent cinquante ans, il s’est fichu de toi, 150 ans  c’est pas possible !

 

GUS en Marius  : Comme je te le dis, je lui ai dit la même chose que toi » tu peux pas avoir cent cinquante ans c’est pas possible ! »Et là il m’a répondu, «l’air marin ça a du bon ça conserve ! »

 

 

GUS en Marius :  ! il m’a répondu qu’il avait trouvé un secret pour ne plus vieillir, alors maintenant il avait tout son temps pour sa passion

 

Al : et c’est quoi sa passion ?

 

GUS en Marius : il traverse  les mers à la recherche d’objets extraordinaires, la seule chose qu’il n’avait pas et qu’il n’arrivait pas à trouver c’était du chocolat.

 

AL : Du chocolat ?

 

GUS en Marius : Oui du chocolat il est fou de chocolat, c’est une passion pour lui, il est capable d’en manger quatre tablettes par jour !

 

AL : il est fou ! Quatre tablettes par jour ! Ça doit le rendre malade !

 

GUS en Marius  : il ne l’était pas, mais il avait les dents dans un état épouvantable, toutes noires et jaunes et il n’en avait presque pas sur le devant.

 

Al : Beurk ! !

 

GUS en Marius  ; Ne m’en parle pas !

 

Al : et alors ?

 

GUS en Marius : et alors ! J’en avais plein mon bateau pour sûre, j’avais même mieux, je revenais d’un  long voyage vers les Amériques, où j’étais passé par les Incas car c’est de là bas que viens le chocolats et j’avais plein de graines de cacao, du chocolat fondant  aux épices et aux poivres et des milliers de parfums différents, il est devenu dinguo quand je lui ai dit que mon bateau était sans doute le navire plus rempli de chocolat du monde entier.

 

AL : hummm du chocolat aux épices ce doit être étrange.

 

GUS en Marius : ça pique et c’est doux en même temps.

 

AL : tu lui en as donné ?

 

GUS en Marius  : il a voulu tout m’acheter 

 

AL : tout ?

 

GUS en Marius : Mais je lui répondu que  le chocolat venu des Incas était très chère, tu penses les incas, c’est l’autre bout du monde, je n’allais pas lui laisser tout prendre sans une bonne contre partie, alors je lui est demandé de m’en proposer un bon prix !

 

Al : et il t’a donné de l’or

 

GUS en Marius : ce n’est pas de l’or que je voulais !

 

Al : ha bon ? et pourquoi ?

 

GUS en Marius  : A quoi me servirait l’or sur un bateau ? Tu sais comme moi, que je suis sur la mer le plus clair de mon temps.

 

AL : ha oui ! Évidemment !

 

GUS en Marius  : moi ce que je voulais c’étaient ces fameux trésors, alors je lui ai dit «donne-moi trois de tes trouvailles et je te donne autant de chocolat que ton bateau peut en contenir ».

 

Al : et il t’a répondu quoi ?

 

GUS en Marius  : il m’a dit exactement, «trois de mes trésors, pourquoi pas  ! c’est possible mais il y aura des conditions ! Je peux t’en donner deux !  Le troisième tu devras l’échanger contre quelque chose qui ne peut pas se toucher ! »

 

AL : c’est à dire ?

 

GUS en Marius  :C’est à dire, ni nourriture ni jolis objets, ni or, ni quoi que se soit que tu pourrais mettre dans ta poche ou dans ta maison.

 

Al : et c’étaient quoi les trois trésors ?

 

GUS en Marius  : le premier c’est une petite bille en verre, quand tu regardes dedans tu sais où tu es !

 

AL : toi qui es toujours en voyage sur la mer ce doit être pratique

 

GUS en Marius  : penses-tu je ne m’en sépare jamais, un simple coup d’œil et je sais immédiatement que je suis ici avec toi .

 

Al : formidable ! et les autres ?

 

GUS en Marius  : le second qu’il m’a donné c’est une petite gourde !

 

Al : une gourde ? pourquoi faire ?

 

GUS en Marius  : au début c’est ce que je me suis dit ! je lui ai dit comme ça «je n’ai pas soif tu peux te la garder ta gourde, donne-moi quelque chose de plus utile »

 

Al : c’est sûr ! Et alors il t’a donné quoi en échange ?

 

GUS en Marius  : attend, c’est là que c’est intéressant, il me regarde dans les yeux, pas content, et il me dit  «dit donc tu me prends pour une truffe de juillet ? Tu crois que je te donnerais une gourde d’eau ? Ecoute-moi ! Cette gourde est spéciale, elle ne se vide jamais elle est toujours remplie du liquide que tu veux, il te suffit de le dire tout haut ! Par exemple je veux du chocolat chaud ! Et hop tu as tout le chocolat chaud que tu veux !

 

AL : extraordinaire !

 

GUS en Marius  : alors il me l'a donné et moi j’essaye, je dis «whisky pur malt » et paf ! J’ai du whisky pur malt, alors je dis sirop de cassis glacé et pof ! Je L’ai !

 

Al : je peux la voir !

 

GUS en Marius  : regarde !

 

Al : je veux de l’Hydromel !  Il goutte, c’est vraiment de l’hydromel !

 

GUS en Marius  : pour sûr que c’en est ! Mais ce n’est pas tout, le troisième trésor arrive.

 

AL : c’était quoi ?

 

GUS en Marius  : Des coquillages, dont un très gros coquillage tout tortillé, il ne m’a pas dit ce qu’il  faisait, il m’a juste dit » celui-ci tu dois l’échanger.

 

AL : Et tu pourrais l’échanger avec n’importe qui ?

 

GUS en Marius : il ne m’a rien dit à ce sujet, mais je pense que oui !

 

Al : alors échange le avec moi !

 

GUS en Marius  : contre quoi ?

 

Al : il regarde dans son sac, j’ai quelques sous, juste douze Euros tous ronds !

 

GUS en Marius  : non, il ne faut pas que ça tienne dans la poche !

 

Al : un ouvre boîte !

 

GUS en Marius  : non

 

AL :  une fraise tagada !

 

GUS en Marius  : non pas de nourriture non plus !

 

Al : un livre de Jule Verne !

 

GUS en Marius  : non

 

Al : des tickets de réduction pour t’acheter des maillots de bain ! Non ? Pour toi qui est tout le temps sur les océans ? Ce serait pratique !

 

GUS en Marius  : Non et encore non ! Il me faut quelque chose ! Que je ne peux ni mettre dans la poche ni emmener chez moi ! Réfléchissons………tu as quoi dans ton sac ?…

 

Al : pas grand-chose juste mon texte que je révise en chemin.

 

GUS en Marius  : un texte ! De quoi ?

 

Al  :  notre prochain numéro de clown à Gustave et moi !

 

GUS en Marius  : Alors je sais ! Vous allez me jouer votre spectacle, juste pour moi !

 

Al : juste pour toi ? Tu seras seul sans aucun autre spectateur, juste toi Gustave et moi ?

 

GUS en Marius  : je ne peux pas l’emporter ni le mettre dans ma poche et j’aime les clowneries, j’en suis souvent privé seul sur mon bateau ! Il est drôle votre numéro ?

 

Al : ho oui c’est drôle !

 

GUS en Marius  : alors ça me fera du bien de rire un peu !

 

Al : marché conclu !

 

GUS en Marius  : je te donne les coquillages ! Ha oui ! Autre chose, le pirate m’a dit «  fait les  cuire le jour de la pleine lune et tu découvriras leurs secrets ».

 

Al : Vient voir notre spectacle demain soir je crois que  c’est justement le jour où la lune est entière.

 

GUS en Marius  : lui donne un sac Alors  à demain le clown !

 

Al : à demain le marin !

 

GUS : il enlève son costume de marin et revient à table avec Al nous avons fait un énorme plat de gros coquillages ils étaient délicieux et dans le plus gros et le plus beau il y avait la carte.

 

Al : Et toi comment as-tu eu ta carte ?

 

DIDY : C’est tout simple, je l’ai depuis toujours, mais je ne le savais pas.

 

GUS : comment peux-tu avoir quelques chose et ne pas le savoir ?

 

DIDY : il était dans mon médaillon, je l’ai depuis que je suis toute petite, c’est ma grand-mère qui me l'a offert, c’était un clown elle aussi, elle me l'a donné en me disant que c’était un vrai trésor et qu’un jour je comprendrai.

 

GUS : et comment as-tu compris !

 

DIDY : Didy raconte son histoire et rentre dans l’action petit à petit, au début elle mime son papillon puis  à l’aide d’un ruban et d’un papillon fixé au bout elle fait des figures  « comme les danseuses de rubans ».  il s’est ouvert tout seul, ce jour là j’étais avec mon papillon je faisais mon numéro dans la rue, plein de gens se tenaient devant moi, mon papillon était éblouissant, il faut dire que c’était le premier jour du printemps et que toutes les fleurs s’ouvraient, il était impatient de butiner quelques fleurs, il s’envolait et faisait des loopings, des vagues, il passait et repassait au travers des anneaux de feu je le sentais plein d’énergie, j’étais heureuse, le public aussi et j’entendais la monnaie tomber dans mon chapeau, il s’envolait toujours plus haut pour exercer des figures toujours plus belles et spectaculaires, moi je sautillais comme une sauterelle ! Et POUF ! Tout à coup mon médaillon s’ouvre en deux et laisse s’échapper une minuscule feuille de papier pliée plusieurs fois, je ne pouvais pas y prêter trop grande attention, il fallais que je continue mon numéro, alors j’ai attendu que tout soit fini, que le dernier badaud soit parti, ce n’est que le soir très tard que j’ai pu trouver le temps de regarder ce petit papier plier, j’ai vite compris que c’était une carte et qu’elle m’indiquerait un chemin à prendre, je venais de comprendre le trésor que ma grand-mère m’avait offert, j’en ai parlé à mon papillon et il a été d’accord pour m’accompagner. Voilà toute l’histoire.  Mais maintenant je ne sais plus où il est.

 

Al : tu sais faire des choses extraordinaires avec ton papillon !

 

GUS : comment fais-tu pour apprivoiser un papillon ?

 

DIDY : Tous les clowns le savent !

 

Al : Non ! Nous ne savons pas !

 

DIDY : mais que faites-vous dans vos numéros ?

 

GUS : moi je suis le clown drôle et AL le clown triste, dans nos numéros je suis plus malin que lui.

 

AL : moi je joue les naïfs !

 

GUS : nous nous faisons des farces.

 

Al : On se lance des gâteaux à la crème.

 

GUS : Je lui donne des coups de pieds dans le derrière.

 

Al : je fais les plus grosses bêtises. Je casse et je renverse tout, je me trompe tout le temps dans ce que je dois faire.

 

GUS : Nous faisons beaucoup rire, on peu aussi jongler, faire le funambule, cracher le feu, rouler sur un monocycle…

 

Al : Mais ce qu’on sait le mieux faire c’est les imbéciles, et ça le public adore ! !

 

DIDY : Je ne sais pas faire du monocycle, ni cracher le feu ! Chez nous les clowns doivent faire rire mais aussi faire rêver, un clown doit être poète et dompteur, c’est pour cette raison qu’il n’y a que des filles clowns,  les garçons eux ne sont pas capables d’être calmes, tendres et patients,  les filles peuvent  parler avec les oiseaux et les insectes..

 

GUS : Nous ne sommes pas comme tu le dis, nous aussi nous aimons les poésies, et je ne suis pas une brute, bien au contraire, mais toi tu dis savoir  parler aux oiseaux ?

 

DIDY : bien sûr ! Mais sitôt qu’ils savent que vous les comprenez, ils deviennent d’horribles bavards, ils ne s’arrêtent, pas de la journée, et pouic pouic pouic et pouic pouic pouic, c’est un enfer ! C’est pour cela que j’ai un papillon c’est plus discret et tout aussi beau. Il ne mange presque rien, une petite fleur par-ci et une par-là et  plus rien durant des jours entiers. 

 

Al : J’aimerais parler avec les oiseaux !

 

DIDY : j’aimerais savoir cracher le feu !

 

Al : je te propose un marché, si tu m’apprends à parler avec les oiseaux je t’apprends à cracher le feu !

 

DIDY :  c’est très long d’apprendre à parler aux oiseaux.

 

Al : Mais nous allons au même endroit ! tu le sais «le cirque des étoiles » je suis sûr qu’ils seront très intéressés par une clown et un papillon, c’est drôle de dire une clown !

 

DIDY : C’est étrange pour moi aussi, tu comprends, dans mon pays les hommes sont des brutes qui ne peuvent parler le langage poétique des clowns ils sont  toujours en colère, ils courent partout en criant et en riant trop fort,  ils n’aiment pas la poésie, les fleurs, les couleurs douces, mais je pense que tout le monde peut se tromper. Vous me semblez être sensibles et  vous pourrez peut-être comprendre ce que les oiseaux et les papillons vous raconteront.

 

Al : Pour nous les femmes ne peuvent pas être tournées au ridicule, quand tu es clown tu fais rire parce que tu es un peu ridicule et puis tu fais des bêtises alors on se fiche de toi, tu comprends moi je ne pourrais jamais mettre un coup de pied à une fille !

 

DIDY : et dis-moi, ton copain Gus, quand il te les donne ces coups de pieds, il te fait mal ?

 

Al : ho non ! il fait semblant, c’est moi qui fais des bonds pour faire croire qu’ils sont très forts

 

DIDY : fait voir ! Elle lui donne un faut coup de pied  il fait un bond énorme ho ! Pardon, je ne voulais pas te faire mal !

 

AL : je n’ai rien senti ton pied ne m’a même pas touché, re-essaye pour voir ! Elle lui redonne un coup de pied et commence à faire le clown, il fait un bon énorme, puis se redresse et retombe à nouveau il joue un moment puis GUS  vient se joindre à eux ils commencent leur numéro de clown, Didy est impressionnée au début puis petit à petit se prête au jeu, elle fini par éclater de rire.

 

DIDY :  vous êtes drôles ! Je peux essayer  ? elle s’approche de AL et lui donne un nouveau coup de pied il fait un grand bon

 

DIDY : comment fais-tu ?

 

AL : Dès que tu sens le pied sur le pantalon tu sautes ! Regarde ! Je vais te montrer ! Il le montre sur DIDY qui au début fait de tous petits bonds, puis petit à petit elle comprend et commence à faire de très grands bonds, ils rient tous aux éclats.

 

DIDY : Tu vois, tu peux me donner des faux coups de pied au derrière, je suis une fille mais je sais faire l’imbécile moi aussi.

 

GUS : c’est vrai tu as raison ! Peut-être que les filles aussi peuvent être clowns

 

DIDY : tout comme les garçons !

 

AL : regardez une trouée dans les nuages, j’aperçois des étoiles !

 

GUS : vite il faut que je regarde dans la machine, lui et Didy se précipitent sur leur appareil respectif

 

AL : alors ?

 

GUS :je pense que l’étoile filante ne devrait pas être loin !

 

DIDY : la comète vous voulez dire ?

 

AL : Une comète ? C’était donc ça ! C’est une comète que nous devons apercevoir et qui doit nous montrer le chemin !

 

GUS : du cirque des étoiles !

 

DIDY : vous savez quand je vous ai aperçus, l’espace d’un instant j’ai cru que c’étaient vous le cirque des étoiles !

 

AL : Nous un cirque !

 

GUS : ce serait un petit cirque !

 

DIDY : il y a bientôt neuf jour que je suis là à attendre cette comète et je ne l’ai pas encore vue, je crois qu’elle n’existe pas ! Que c’est une grande farce !

 

Al : Moi j’ai envie d’y croire ! Tu veux manger quelque chose ? il nous reste un fond de soupe de cresson et quelques épinards !

 

DIDY : Oh oui volontiers, j’adore les épinards !

 

AL : Ah ! Tu vois Gus ? DIDY a  bon goût, elle !

 

GUS : mais je les ai mangé tes épinards !

 

AL : du bout des lèvres «il imite Gus ce qui a pour effet de faire rire Didy »

 

GUS : pourquoi veux-tu trouver le cirque des étoiles ?

 

DIDY : J’ai besoin de vivre d’autre choses, de rencontrer d’autres personnes d’apprendre de nouveaux numéros.

 

AL : A dire vrai nous aussi, nous cherchons l’inspiration, nos numéros se ressemblent trop, on a besoin de nouveauté !

 

DIDY : Je travaille en solitaire depuis toujours, juste  mon papillon et moi, des fois j’aimerais avoir un partenaire comme vous.

 

GUS : Tu pourrais rester avec nous, tu en penses quoi Al ?

 

Al : ce serait bien ! Pourquoi pas, si tu en as envie, et puis on va au même endroit.

 

DIDY : Alors je peux rester un peu avec vous !

 

AL : Bien sûr que tu restes ! Ce n’est pas tous les jours qu’on rencontre une femme clown et puis tu dois m’apprendre à parler aux papillons et moi je t’apprendrai à faire des numéros, à cracher le feu, je sais nous allons t’apprendre ce que nous savons et toi tu va nous apprendre ce que tu sais !

 

DIDY : Je suis d’accord GUS lui apporte un bol et une assiette elle se jette dessus, c’est très bon, j’ai des herbes dans mon sac qui iraient très bien avec.

 

GUS : le ciel est très clair je vois où nous sommes, et j’ai une bonne nouvelle !

 

AL : c’est quoi ?

 

GUS : plus besoin d’avancer Al, nous sommes arrivés, il n’y a plus qu’a attendre la comète et si mes calculs sont bons elle devrait apparaître dans quelques minutes.

 

Al : Nous allons enfin voir le cirque des étoiles, il faut que je mette mon costume.

 

GUS : bonne idée moi aussi !

 

DIDY : je vais revêtir le mien !

 

Ils partent se changer, Gus le plus rapide revient avec des accessoires de cirque : balles, bâton du diable

Al revient avec du maquillage et ils se maquillent.

 

Al : J’ai plein de couleurs si tu veux Didy, du vert pour les yeux, du rouge pour les lèvres et du blanc pour le reste.

 

GUS : Pourquoi ries-tu Didy ?

 

DIDY : vos maquillages sont amusants, regardez les miens ! Je vous propose que l’on mélange les deux.

 

GUS : Avec toutes ces couleurs on va se faire remarquer !

 

Al : On va être beau.

 

Ils finissent de se maquiller et attendent en regardant le ciel

 

DIDY : elle ne vient pas…….. Elle commence à danser, puis sort de son petit sac un appareil à faire des bulles, elle le pose au sol et commence à faire des bulles de toutes les tailles, Gus et Al regardent subjugués, puis petit à petit se mêlent au spectacle ils dansent autour des bulles les éclatent Al essaye de les manger il trouve cela horriblement mauvais il commence à vouloir les éclater avec le nez les fesses, les pieds, Gus l’imite, ils commencent à faire un numéro tout les trois. Ils s’amusent, rient, jonglent à travers les bulles inventent des nouveaux jeux rentrent dans le public «interaction avec le public » puis petit à petit tout redevient calme ils finissent en s’applaudissent  mutuellement.

 

GUS : On s’est bien amusé !

 

Al : On a bien rigolé !

 

DIDY : On a fait quelque chose de nouveau !

 

GUS : quelque chose de différent !

 

AL : de surprenant !

 

DIDY : On devrait recommencer !

 

Al : oh oui ! C’est une bonne idée !

 

DIDY : On fera le plus grand numéro de clown de l’univers !

 

GUS : Des clowns filles et garçons dans un spectacle plein de rêves et de drôleries !

 

DIDY : Je suis heureuse de vous avoir rencontrés !

 

AL : Et nous aussi !

 

GUS : Et le cirque des étoiles ?

 

……..

 

GUS : Vous avez toujours envie de le voir !

 

Al : je ne crois pas, j’ai surtout envie de refaire notre nouveau numéro, avec toi Didy !

 

DIDY : Moi aussi ! il faut partir d’ici et aller où il y a du monde.

 

GUS : Vous êtes sûrs ? Et le cirque

 

DIDY : Je ne veux pas y aller, l’univers c’est trop grand, en faite, je crois en fait que c’est nous le cirque des étoiles vous savez, c’est notre rencontre.

 

AL : Oui c’est nous ! On s’est rencontré sous les étoiles ! C’est un signe ça ! Non ?

 

DIDY : mais avant, Je dois retrouver  Manou buterfly mon papillon.

 

AL : on va t’aider à le retrouver !

 

Ils remballent tous leurs sacs dans les rires et la bonne humeur, Didy ouvre une petite boîte et appelle son papillon. Ils sont tous fin prêts sac sur le dos et partent en appelant le papillon

 

AL, DIDY, GUS : Manou….. Manou…..

 

 ils partent tout les trois le plateau est vide on voit alors un papillon très coloré qui les suit…

 

 

 

                                                           FIN.

                       

 

 

 

               Le Trou

De Roland Bideau

 
  

 

 

 

 

Deux hommes sont enfermés dans un trou, ils sont condamnés à mort C’est la veille de l‘exécution, la nuit. La lumière devra changer au fur et à mesure de la pièce. De la nuit avec la clarté de la lune vers le petit jour. Ils savent que dès les premières lueurs de l’aurore ils seront exécutés. Ils ne savent pas pourquoi exactement ils sont là, ils s’en doutent vaguement mais n’ont pas d’idées précises, ils ont tous les deux commis des actes répréhensibles, mais jamais on leur a dit pour quels actes  ils se retrouvaient dans cette situation.

Jim a les yeux à moitié bandés, il porte un costume clair très sale, n’a pas de chaussures, juste de grosses chaussettes. On peut voir qu’il a les pieds bandés car il ne peut presque pas marcher sans souffrir le martyre. Il a environ 40 ans, a eu une vie bien agitée ; c’est un grand séducteur,  il ne parle pas beaucoup, cache ses émotions. Il  a très peur dans son trou mais ne le montre pas, Jo est un solitaire, c’est un personnage qui est continuellement agité. A l’inverse de Jim, il montre tout, même eu peut trop. Sa plus grand peur, c’est de mourir seul. Il porte un pantalon sombre à fines rayures, une grosse chemise en cotonnade sans boutons (sûrement arrachés) les manches relevées. Il porte un Marcel  blanc très sale. C’est une pièce très sombre on n’aperçoit juste une lueur venue du soupirail  et une lampe à pétrole (ou une bougie) le sol est crasseux, il y a deux gobelets et deux assiettes en métal, deux vieilles couvertures.

 

 

Scène 1 Les morpions

 

Jim et Jo sont roulés en boule dans un coin de la scène on ne distingue que leur dos

 

Jo : ça gratte ! !

 

Jim : ferme les yeux et pense à autre chose, à rien par exemple!

 

Jo : à rien ! Il se redresse T’es drôle toi ! comment veux-tu que je pense à rien ? Pour penser à rien faut avoir les mains ou autre chose occupées, mais quand tu fais rien toute la journée, tu penses forcement à des tas de trucs.

 

Jim : ferme-la par pitié !

 

Jo  il essaye de se gratter le dos : ça me gratte !

 

Jim : moi aussi ça me gratte, et tu voix j’dis rien, alors fait pareil !

 

Jo :  le problème c’est que moi  j’peux pas m’arrêter d’penser…il se rapproche de Jim là par exemple je visualise un bon petit gueuleton, un gigot bien sanglant avec des petits champignons en sauce, et des patates à la Sarladaise, ça me fait du bien de te parler, qu’est-ce tu veux, c’est cathartique, faut que je cause sinon je stresse et quand  je stresse j’ai des bouffées de chaleur, je me chope des plaques, ça me gratte et là j’me plains… alors tu préfères quoi ? Que j’te cause ou que j’me plaigne ? .

 

Jim : j’vois pas trop la différence ! T’aurais pas un truc qui ferait qu’tu la fermes !

 

Jo : …

 

Jim : ben voilà, c’est mieux ! Tu voix quand tu veux tu peux !

 

Jo il se tortille dans tout les sens, essaie de se gratter l’omoplate :  … ça me gratte, j’ai un truc dans le dos, une petite boule, j’peux presque la sentir, dit Jim, tu voudrais pas la toucher pour m’dire ?

 

Jim : ça va pas non ! J’touche rien ! Tu m’entends !

 

Jo : C’est les morpions qui m’bouffent de l’intérieur ! J’la sens, elle est mobile, juste sous l’omoplate.

 

Jim  moqueur : c’est pas elle qui va te tuer !

 

Jo  agressif : Ne parle pas de ça ! On avait dit qu’on n'en parlait pas ! Si t’en cause encore, moi j’te casse la gueule, t’as compris ?

 

Jim  incrédule : oui, c’est ça, tu vas m ‘casser la gueule ! ! ?

 

Jo  il s’agite de plus en plus : j’la sens qui grossit ça m’fait flipper d’avoir un truc et d’savoir que tout le monde s’en fout !

 

Jim : t’avais qu’à te laver la dernière fois qu’y avait de l’eau.

 

Jo : j’ai pas confiance je suis sûr que c’est l’eau de leur chiotte qui nous mettent, t’as vu l’odeur qui s’en dégage ? Et pis vaut mieux sentir son odeur que celle de leurs fesses.

 

Jim :  le problème c’est que ton odeur elle plait aux morbacs, alors moi je préfère sentir leurs culs et être pépère de se coté plutôt que de flipper pour des boules sous la peau. Remarque c’est peut être une boule de crasse !

 

Jo : Non ! Non ! C’est les morpions à force de m’sucer le sang y z-ont fini pas se servir à la source, y  veulent me bouffer d’l’interieur  les salauds !

 

Jim : j’imagine la tête des autres si t’es déjà mort avant l’exécution !

 

Jo   il le cogne, ils se battent :  je t’avais prévenu, j’vais te tuer !

 

Jim   essaye de se protéger : lâche moi bordel, je vois rien! tu frappes un infirme ! enfoiré ! !

 

Jo  soudain Jo se fige, Jim fait tout pour l'éloigner ; il finit par l’empoigner par le dos tandis que Jo est sur lui :  ho oui là ! ! Oui ! Oui ! Bouge plus, va y gratte c’est exactement là !

 

Jim  Jo lui retient la main : lâche ma main Jo !

 

Jo : ho ! Non c’est incroyable comme ça fait du bien, va y s’te plait gratte fort.

 

Jim : je t’ai dit lâche ma main ! Il se dégage  t’es pas bien dans ta tête toi, j’ai pas envie de te toucher ! Tu pues !

 

Jo : Hééé ! Toi aussi tu pues ! tu crois quoi ? parce que tu te rinces légèrement la gueule toute les deux semaines avec de l’eau croupie, que tu sens la rose, ben non ! Mec, toi aussi tu shlingues !  

 Elle est jolie la solidarité ! Vraiment, t’es sympa y’a pas à dire,  moi si t’en avait besoin j’te gratterais, ! Parce que malgré tout y’a un cœur la dessous…

 

Jim : alors file moi tes pompes !

 

Jo  regarde ses chaussures il essaye de se gratter le dos mais n’y arrive pas : Non je peux pas !

 

Jim : ben alors la solidarité t’en fait quoi !

 

Jo : je peux pas Jim, je t’expliquerai un jour pourquoi , mais là c’est non ! je suis désolé !

 

Jim : ouais c’est ça ! tu m’expliqueras, dans les nuages ? ou juste avant de se faire déglinguer ? histoire de me faire pitié ? ou de gagner ta place au paradis ?  mais te fais pas de bile, Jo, y’en a pas de paradis pour les types comme toi ! Ça te dérange pas que je me gèle les panards ! Que je souffre le martyre chaque fois que je me lève ? Tu veux savoir Jo ? T’es qu’un putain d’égoïste. Tu pense qu’a ta gueule ! Me retrouver avec toi c’est la pire chose qui me soit arrivé, pourtant j’en ai connu des connards mais des comme toi, jamais ! T’es unique dans ton genre, et puis j’ai plus envie de parler j’ai plus envie d’t’entendre t’as pigé ! j’ai envie d’être seul pour le temps qui me reste à vivre, être seul dans mes rêves, mes souvenirs, alors si t’es un peu intelligent tu vas comprendre ça Ok, et tu vas la fermer pour de bon

 

Jo :  un temps, il se tâte le cœur inquiet. J’ai des palpitations Jim, j’ai mon cœur qui fout le camp ! je me sens pas bien Jim

 

Jim : hum !

 

Jo : Jim parle-moi !

 

Jim : hum, c’est pas vrai ! Mais quel cauchemar ! T’es pire qu’une gonzesse ! avoir la paix avant de claquer c’est trop

demander ?

 

Jo : plaintif Je t’en supplie me laisse pas seul j’ai peur tout seul ! Jim ! Hé Jim, j’ai des fourmis dans le bras gauche ! C’est pas un signe ça ! Ça veux pas dire que mon cœur y va faire un arrêt ? Jim ? JIM ! JIM ! S’arrête soudain qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça moi hein ? L’bon Dieu la haut ! Tu m’entends ? Y’ a des types pires que moi, et tu les laisse peinards eux !

Saloperie vous voulez ma peau !

Tiens j’en ai chopé un, ha ! ha ! Mon p’tit père je vais t’éclater ! il l'observe tiens t’as une drôle de tête toi tu sais ? Ou,i moi aussi,  je sais. Qu’est-ce que  tu fous là ? Hein ? T’as pas pu trouver mieux comme planque ? Pourtant c’est pas ça qui manque, ouais, je sais on choisit pas toujours. Une dernière volonté avant de claquer ? Quoi ? Ho non ! T’as des potes toi ? Non ! T’es un tout seul comme moi, quelle merde la vie des fois, quand on est petit on croit que tout ira bien que la vie sera forcement belle et puis on se retrouve  là, au beau milieu de nul part ! Sans savoir pourquoi ! Toi au moins tu peux te casser ! C’est vrai ça tu peux te faire la malle, ben alors qu’est que tu fous ? Allez, du vent, du balais, j’te tue pas ! Tire-toi avant que je change d’avis ! Tu vois la vie elle peut être belle des fois ! Non ? Quoi tu reviens ? T’es con le morbac ! Enfin je t’avais prévenu, bye bye !

 

il l’écrase , se couche , se tourne et se retourne n’arrive pas à trouver une position, se remet assis et chantonne une chanson de son cru.

 

Scène 2 Jim parle à son ange

 

Jimchuchoté c’est toi ?  j’te vois pas !

 

Jo : t’es drôle toi !

 

Jim : t’es où ?

 

Jo : Ben là! toujours au même endroit !

 

Jim : Ah ! voilà j’te vois !

 

Jo :étonné  c’est vrai ça,? tu me vois ? mais c’est un miracle  ! tu me vois vraiment ? c’est épatant Jim depuis ce temps ! t’as enfin recouvré la vue !

 

Jim : Chuchoté tu sais, j’ai le trouillomètre qui s’affole !

 

Jo : heureux de te l’entendre dire ! Moi c’est kif kif !

 

Jim  furieux : c’est pas à toi que je cause ! Triple andouille c’est à mon ange !

 

Jo il se rapproche de Jim :  elle est là ? Comment qu’elle est Jim ? Dit qu’est-ce qu’elle porte sur elle ? Allez dis-moi !

 

Jim : ho ! Non pars pas, je suis tout seul là,  j’ai besoin de voir quelqu’un ! Lui c’est Jo ! Tu sais y parle, mais il y pige rien, y peut pas comprendre notre relation, en fait y te voit pas lui !

 

Jo : alors Jim ! Elle est toujours aussi belle ?

 

Jim il parle à son ange lève un peu la tête comme si il était debout :Tu sais il s’en ai passé des choses depuis la dernière fois, je crois que c’est la fin, c’est pour demain d’après ce que l’on a compris, j’aurais bien aimé comprendre ce qui c’est passé ! je me demande comment y vont s’y prendre, j’espère juste que ce sera pas trop douloureux ! La décapitation ça serait bien, il parait qu’après tu vois ton corps durant  30 secondes , ça doit être drôle comme sensation et puis ça a des avantages, c’est vite fait, bon, tu dois beaucoup saigner, mais tu sens rien, remarque je dit ça mais en fait personne n’est revenu de sa décapitation pour en

parler !  Tu sais t’es la seule chose que je vois alors ce serait sympa si tu pouvais être pas trop loin le moment venu ! Quoi tu bosses à cet heure-ci ? Ben t’aurais pu faire un effort ! J’comprends t’es pas dans la même sphère que moi. Ça n’empêche que ça te coûte pas grand chose!

Et puis dit toi que tu seras débarrassé de moi après! Remarque, c’est donnant-donnant, tu viens pour l’exécution et moi je passe pas ma vie à te hanter!

 

Jo: Jim qu’est-ce qu’elle  raconte ?

 

Jim : Elle me dit que je vais lui manquer, mais que d’une certaine façon c’est pas plus mal parce qu’elle souffre du décalage horaire, quand c’est la nuit ici, là bas c’est le jour, alors nos relations ne sont jamais branchées sur notre bon cycle de sommeil !

 

Jo: je comprends rien !

 

Jim à son ange : je lui explique mais y comprend rien, il est pas très rapide du cervelet!

 

Jo: j’te remercie

 

Jim: t’as fais les recherches pour moi?

 

Jo: Alors?

 

Jim: Ben celle de la dernière fois ! Y faut que tu m’aide , j’ai besoin de savoir pourquoi je suis là, c’est peut-être con, mais j’aimerais savoir pourquoi je vais crever ! Je te demande pas grands chose, juste un petit tour chez les keufs et tu leur demande si il y a déjà eu un mandat ou une arrestation au nom de Albert Drejim!

 

Jo : Albert Drejim c’est qui celui-ci ?

 

Jim à Jo : à ton avis?

 

Jo: Ben j’en sais foutre rien ! Je connais pas ce type ! 

 

Jim: aller un petit effort quoi !

 

Jo: Ben j’te dis que non!

 

Jim à son ange : Mais pas toi ! L’autre ! non toi ! je veux dire, enfin pas l’autre ! à Jo mais toi ! Toi !

 

Jo: Je suis largué Là !

 

Jim à son ange : Tu peux pas t’as trop de bouleau! Ben tire-toi alors ! Comment, “ c’est pas possible ? ”

 

Jo: Elle dit quoi là?

 

Jo à son ange : tu veux dire que c’est moi qui décide ? mais tu plaisantes ?  je ne décide rien! tu apparais comme ça ! sans que je te le demande! je te vois là! Paf ! tout à coup, alors que je vois rien d’habitude!

 

Jo: Bon, ben tu me raconteras après, y’a pas de mal!

 

Jim:  toi tu me vois pas ? Mais c’est horrible ce que tu me dis! tu m’entends et c’est tout? Mais alors si tu me vois pas, tu peux pas comprendre ! Écoute concentre-toi et imagine, je vais te décrire ce qu’il en est pour moi et Jo.

 

Jo: c’est le comble c’est toi qui est aveugle et c’est elle qui te vois pas, alors que toi tu la vois, bien que tu sois aveugle. C’est vraiment n’importe quoi !

 

Jim: on est dans une espèce de trou ! Y’a juste une lucarne avec des barreaux mais elle est à 6 ou 7 mètres, c’est ça hein Jo?

 

Jo: Ouaip!

 

Jim il parle de plus en plus fort comme si son ange était de plus en plus loin : Le sol c’est de la terre battue, Humide, c’est pour cette raison, entres autres, que mes articulations des pieds ont doublées de volume et que je ne peux plus bouger!

 

Jo: Ouaip!

 

Jim : On nous passe de la bouffe par une espèce de petit trou, qui est fermé par des grilles, genre égouts!

 

Jo: ouaip, enfin c’est plutôt des grilles de prisons, les grilles d’égouts c’est plus fin!

 

Jim: moi j’ai un vieux costume blanc, enfin, je le porte depuis 6 mois alors il est plutôt devenu gris, j’ai un bandeau dans les yeux et les pieds dans des bandelettes à cause de l’humidité comme je te l’avais dit, voilà!

 

Jo: Jim!! mais oui c’est ça Albert Drejim c’est toi Dre-Jim Jim quoi!

 

Jim: à Jo oh ben tu sais que t’es un malin toi

 

Jim: alors comme ça tu t’appelles Albert?

 

Jim: ben ouaip !

 

Jo: Moi c’est Joseph Perrin !

 

Jim: je m’en doutais!

 

Jo: ah bon ?

 

Jim: ben oui ! Jo! Joseph ! y’avais pas beaucoup d’alternatives.

 

Jo: c’est drôle qu’on ne se soit jamais dit nos vrais prénoms depuis tout ce temps.

 

Jim: On m’a toujours appelé comme ça! et puis j’aime pas “ Albert ”….  À son ange T’es encore là ? Mais non c’est pas dans ta tête, dans la mienne à la rigueur! Mais j’existe vraiment ! Je sais pas comment je me suis retrouvé ici, pourquoi j’ai plus de mémoire, c’est encore confus dans ma tête, mais je sais que quand y m’ont retrouvé j’étais au milieu de cadavres, y z’étaient pas frais, ça devais faire plusieurs jours que j’étais là, inconscient, j’avais les pieds bien amochés, j’ai perdu la vue quelques heures après, je crois que mes yeux ont fait la grève tellement c’était horrible, mes pieds ont refusé de cicatriser pour plus me porter et mon cerveau a fait blocus, le problème c’est qu’il a tout effacé ! Ou presque tout!alors tu vois, je crois que des trucs pareils ça peut pas s’inventer…..  Quoi schizophrène ? Mais non T’es pas schizophrène !

 

Jo : c’est qui schizophrène?

 

Jim  à Jo : Hoo! Non , Jo! C’est pas vrai, t’as aucune culture , tu sors d’où ? C’est pas quelqu’un c’est une maladie, c’est elle qui croit qu’on existe pas, que c’est dans sa tête que le bouchon a été mal revissé, elle croit qu'elle est barjot qu'elle entend des voix comme Jeanne d’Arc !

 

Jo: elle croit qu’on est Dieu ?

 

Jim : NON, elle croit qu’elle est bonne à enfermer, qu'elle est folle à lier ! En gros elle y croit pas à notre histoire !

 

Jo : mais c’est pas possible! Raconte-lui qui on est! Y doit bien y avoir des avis de recherche ? Des panneaux sur les murs avec nos photos ! Dans les journaux ils doivent bien parler de gens qu’ont disparus ? Y nous ont pas oubliés si vite quand même!

 

Jim: qui ça “ ils ” ?

 

Jo: Ben je sais pas moi, les gens ! La société ! L’administration ! D’habitude ils oublient personne eux! Moi je suis tout seul , mais toi t’as bien quelqu’un qui se fait du mouron pour ta turbine!

 

Jim: Ben j’en doute là tu vois!

 

Jo :Merde, c’est pas possible ! mais moi j’y crois  que quelqu’un va nous sauver au dernier moment ! Si personne parle de nous ! Si personne ne sait! Personne viendra! Et on va vraiment y passer!

 

Jim: t’es vraiment un rêveur toi , tu crois au père noël ? Y nous ont pas relachés pourquoi à ton avis?

 

 

Jo: parce qu’ils  attendent la rançon !

 

Jim : mais la rançon pour qui ? T’es le premier ministre ? Un gros industriel ! Un star du show bizz ? oooh merde alors, je suis enfermé avec colombo et j’ai même pas une feuille de papier pour un autographe ! Tu vaux quelque chose toi !? Je le crois pas … à son ange y pensait qu’on viendrait le sauver, on sait même pas où on est !

 

Jo : mais les autres ils les ont bien libérés eux

 

Jim: ils les ont zigouillés oui!

 

Jo : alors là ? c’est la fin !  Ben merde je voyais pas ça comme ça , quand je pensais à la mort, j’imaginais plutôt que je m’endormais un soir d’été sous les oliviers et POF je montais au ciel !

 

Jim : et POF ! Comme un bouteille de champagne, c’est vrai que c’est plutôt sympa comme mort!

 

Jo : oh ! Oui c’est comme ça que je veux claquer ! Demande si elle regarde dans les journaux, dit lui que je veux pas mourir comme un bête, j’veux être un papi sous les oliviers et regarder une dernière fois le ciel!

 

Jim: bien sûr qu’elle les regarde les infos, les journaux et même la presse étrangère!

 

Jo: et alors!

 

Jim : Ben rien, là elle me répète “ allez vous-en, j’veux plus vous entendre ” en boucle depuis un moment 

 

Jo : il se rapproche de son oreille comme pour parler à l’ange de Jim Mais elle a pas le droit ! Hein! Hé toi ! Tu m’entends? On est pas des schpitsophremes ! On veut être sauvé !alors démerde-toi pour nous retrouver! ET VITE ! DEMAIN ON SERA PLUS LA !

 

Jim : mais arrête! Tu me casses les oreilles! J’ai plus que ça qui marche ! Et puis elle peut pas t’entendre !…. Quoi , c’est qui qui hurle , tu l’entends lui aussi !

 

Jo: c’est pas vrai elle peut m’entendre ? Hé ma belle! Tu m’entends, mais c’est épatant ça! Moi c’est Joseph je suis beau comme un dieu!

 

Jim : ta gueule Jo! à son ange c’est rien il a pas toute sa tête!

 

Jo: Pourquoi que je l’entends pas moi , elle peut tout entendre et moi niet, c’est peut-être à cause que chuis pas aveugle!

 

Jim : écoute moi une dernière fois après j’te promets que je te fous la paix : tu vas aller voir les gendarmes ou le FBI ou la CIA , ou, je sais pas moi , les autorités ! Et tu leur dis qu’un indic leur a parlé de deux mecs qui sont enfermés dans un trou.

 

Jo: ça tient pas debout ton truc!

 

Jim: ah bon et pourquoi?

 

Jo : ben un indic il aurait jamais ce genre de plan, qu’est-ce qu'il gagne à donner une info comme ça ?

 

Jim : ben je sais pas moi, il a des remords, un cas de conscience, il nous aime bien, il a envie de changer de vie et de plus être un salaud, et puis merde, on s’en fout, le principal c’est qu'il nous trouve et qu'il veut nous aider, non ?

 

Jo : Ouais t’as raison ! C’est juste un brave type et y nous a entendus parler de notre trou par erreur, et alors comme ça y c’est dit, j’vais les aider!

 

Jim: Ben si tu veux! À son ange bon, je continue, tu leur dis qu’on va se faire zigouiller demain… où on est ? J’en sais fichtre rien, dans un autre pays je suppose, mais on sait pas où ! ils nous ont pas mal trimballés avant qu’on arrive dans notre trou, tu vois comment y vont réagir, et si ça les intéresse tu leur donnes mon nom, tu leur dit qu’on étais cinq et que les autres ont disparu une nuit alors que Jo et moi on dormait,  je suppose qu’on les a tués.

 

Jo: c’est pas sûr ça ! Peut-être qu’on les a relâchés !

 

Jim: peut-être bien que oui ! mais peut-être bien que non ! toujours est-il qu'on a jamais su comment ils s’appelaient. A l’époque où ça c’est passé, il y a environ trois semaines, y nous mettaient des cagoules et des baillons qu'ils nous enlevaient  pour bouffer. On n'avait pas le droit de parler, et puis y’a environ deux semaines y se sont plus occupés de nous, enfin, juste pour bouffer. On a eu un  peu de répit et d’espoir ! Hier soir y nous on fait comprendre qu’on allait y passer demain matin à l’aube, on pensait que c’était pour nous faire flipper, mais j’en suis de moins en moins sûr. C’est vrai qu’on est peut-être pas des anges mais on est des hommes et on veut pas être traité comme des bêtes. T’es le seul espoir qui nous reste et il est mince , je sais pas pourquoi c’est toi que je vois depuis cinq jours... Je suis peut-être en train de devenir complètement barré. Je sais que Jo, il croit en toi alors mon gars va pas falloir nous décevoir , OK t’as pigé ?

 

Jo: c’est vrai ça ! C’est beau ce que tu as dit Jim, mais pourquoi t’as dit mon gars ?

 

Jim : j’ai dit ça moi?

 

Jo: Comme je te le dit !

 

Jim: Ben… C’était de rigueur !

 

Jo: Ah bon !

 

Jim: ben merde elle est partie!

 

Jo: chuis désolé !

 

Jim: pourquoi?

 

Jo: Ben je sais que je parle trop et là j’ai vraiment l’impression que c’est moi qui la fait fuir !

 

Jim: c’est bien possible, alors tu vois y faut la fermer des fois !

 

Jo:  peut-être qu’elle a pris peur quand tu lui as dit comment qu’on se trouvait tous les deux !

 

Jim: qui sait!

 

 

Scène 3 La danse

 

Jo:  après un moment  se met à courir  il fait de grands mouvements de box française gauche, droite, gauche ,droite droite!

 

Jim : Oh non ! Tu vas pas remettre ça ?

 

Jo : ça me défoule !

 

Jim : Mais t’es né comme ça, ou c’est venu plus tard ?

 

Jo : Quoi ? il tourne autour de Jo

 

Jim : D’être insupportable ! Toujours speed, t’as pas du avoir une enfance facile toi !

 

Jo : Je sais pas ! Mais c’est un des seuls trucs qui me fait du bien quand je stresse , ça et autre chose !

 

Jim : et c’est quoi l’autre chose ?

 

Jo : boh ! C’est rien de tout façon , ici on peut pas !

 

Jim : ça peut pas être pire que de t’entendre courir dans toute la pièce ! tu vois Jo le problème c’est pas tant que tu courres qui m’embête, mais c’est plutôt que tu me donnes une estimation de la taille de ce trou et moi j’imagine chaque fois que c’est plus grand, je suis claustro !

 

Jo : Claustro ? ?

 

Jim : Oui ! Claustrophobe ! C’est la peur d’être enfermé !

 

Jo : et bien t’es gâté là !

 

Jim : Arrête , j’ai du mal à respirer ! alors tu vois s'il existe quelque chose pour t’empêcher de courir je suis preneur et je ferais tout ce qu’il faut pour que tu t’arrêtes

 

Jo : tout ?

 

Jim : Ho ! oui ! tout !

 

Jo : ça m’étonnerait !

 

Jim : Stop par pitié Jo tu me donnes le tournis !

 

Jo :j’peux pas c’est phisologique

 

Jim : physiologique !

 

Jo : ouais c’est ça ! quand je commence j’peux plus m’arréter ! faudra t’y faire ! droite, gauche, gauche, opercut droite, coup de pied gauche, droite, droite

 

Jim : je t’en prie Jo c’est quoi l’autre truc ?

 

Jo : c’est danser !

 

Jim : ben oui ! c’est bien ça, danser ! je peux même te chanter quelque chose si tu veux !

 

Jo : tu connais quoi ?

 

Jim : Jai le souvenir de quelques chansons, …ce que tu veux, je peux en inventer une si tu veux!

 

Jo : et tu crois que tu peux chanter et danser en même temps ?

 

Jim : pourquoi tu voudrais que je danse ?

 

Jo : une valse, un fox trott ou un tango, ça se danse à deux, tout seul c’est dur et pas drôle.

 

Jim : Hein !Non ! ne me dis pas que tu veux danser un tango ! et puis ça se chante comment un tango ? et surtout est-ce que ça se chante seulement ?

 

Jo : chanté Moi je suis tango tango ! j’ai le rythme dans la peau, moi je suis tango tango !

 

Jim : oh non je le crois pas , et ben si tu crois quemoi et mes arpions on va se lever je vais me lever pour chanter et danser un tango avec toi, tu peux toujours rêver !

 

Jo : OK, gauche droite gauche gauche  pied, pied retourné gauche…

 

Jim : Bon d’accord, d’accord si ça peut t’arrêter !

 

Jo : ouah ! ! C’est pas vrai t’es vraiment prêt à danser avec moi, alors là j’aurais jamais cru, tu me souffles là! Allez, viens je te guide, tu t’appuies sur moi et tu te laisses conduire, tu vas voir c’est simple comme tout, on va y aller tout doucement.

 

Jim : compte là-dessus ! une danse et puis c’est tout !

 

Jo : Ok super !

 

Jim : attention aux petons y sont tout endoloris !

 

Ils dansent et chantent les fenêtres de Jaques Brel d’abord  Jim, puis Jo se joint à lui, ils ont l’air un instant de s’amuser !

 

Les fenêtres nous guettent                                                    Les fenêtres sanglotent
Quand notre cœur s'arrête                                                     Quand à l'aube falote
En croisant Louisette                                                             Un enterrement cahote
Pour qui brûlent nos chairs                                                      Jusqu'au vieux cimetière
Les fenêtres rigolent                                                              Mais les fenêtres froncent
Quand elles voient la frivole                                                   Leurs corniches de bronze
Qui offre sa corolle                                                                 Quand elles voient les ronces
À un clerc de notaire                                                                Envahir leur lumière



Les fenêtres murmurent                                                        Où passent les Messieurs
Quand tombent en chevelure                                                Qui habitent l'impasse
Les pluies de la froidure                                                        Quand une femme passe
Qui mouillent les adieux                                                         Mais les fenêtres jacassent
Les fenêtres chantonnent                                                       Vient leur fermer les yeux
Quand se lève à l'automne                                                     Et que la neige épaisse
Le vent qui abandonne                                                          Quand l'hiver les apaise
Les rues aux amoureux                                                          Les fenêtres se taisent

 

Jim : Jo lui marche sur les pieds Ha ! putain mais quel con, je suis sûr que tu l’as fait exprès

 

Jo : ho non Jim je t’assure je suis désolé !

 

Jim : c’est ça oui ! on a pas idée d’avoir des pannards aussi grands et maladroits ! !

 

Jo : je sais, j’ai des grands pieds, enfin plutôt des grandes chaussures, bon c’est vrai que j’aurais pu te le dire plus tôt, mais j’en fait un vrai complexe et puis c’est con à dire mais c’est beaucoup plus emmerdant que ça en à l’air, je suis né comme ça , avec un pied droit deux centimètres plus grand que le pied gauche. Les gens quand je leur en cause ils se foutent de ma gueule, faut dire que les pieds ça fait toujours marrer les autres, d’ailleurs on dit bête comme ses pieds. Ca a toujours été un enfer de trouver des paires de pompes, ou j’en avait une trop grande ou une trop petite, et tu peux pas savoir comme c’est agaçant de pas se sentir pareil des deux pieds, alors j’ai opté pour du trop grand aux deux pieds, ce qui me fait du 45. Et c’est vrai que je sens pas le bout de mes pieds, je suis désolé Jim je sais que tu as mal et jamais j’aurais marché sur tes pieds sciemment. Tiens je te les donnes !

 

Jim : tu me les donnes ?

 

Jo : ouais Jim, je te les donnes, tu as dansé pour moi alors je peux bien faire ça !

 

Jim : tout gêné il ne sais quoi dire ben merci Jo !

 

Jo : se dandine d’un pied à l’autre car il a froid aux pieds tu sais tu chantes bien ! t’aurais pu être chanteur, si j’avais su que tu savais pousser la chansonnette aussi bien, tu l’aurais fait plus souvent ces quinze derniers jours ! Mais j’y pense, c’est p’têtre ça ton métier t’es peux-être un chanteur ?

 

Jim : il enfile les chaussures Qui sait, t’as peut-être raison, mais alors pourquoi je suis là ! hein ! C’est pas bien méchant un chanteur , ça prend un peu de coke de temps en temps, mais y m’ont pas mis au trou pour un peu de dope, tu vois Jo je pense que je suis pas très clair, j’ai du faire des machins pas honnêtes, je me raccroche à ça tu vois, je me dis que j’ai du comettre des horreurs, c’est plus rassurant pour moi de me dire que je suis une saloperie et que le monde ne perd rien !

 

Jo : tu as sans doute raison ! n’empêche que ce doit être agréable de n’avoir aucun remord, de ne se souvenir de rien, même pas du sang que tu as sur les doigts, parce que le remord, c’est le truc le pire qui puisse exister, moi tous les jours j’y pense, tous les jours, j’essaye de savoir pourquoi et quand est-ce que j’ai basculé dans ce cauchemar.

 

Jim : on peut voir les choses comme ça !

 

Jo : y faut toujours voir le positif même dans le négatif ! c’est comme une photo quand l’image apparaît dans le bain révélateur c’est magique c’est le positif du négatif ! tu me suis ? j’essaye de me dire que les mecs que j’ai envoyés au placard et ben y

z'auraient pu faire pire que moi si je les avais pas butés ! et alors là la vie est belle !

 

Jim : si on peut dire que se faire condamner à mort sans savoir pourquoi c’est positif alors je te suis

 

Jo : en tout cas une chose est sûre ! c’est que t’as dû savoir danser !

 

Jim : Ah bon et pourquoi ?

 

Jo : Tu te débrouilles plutôt bien avec tes pieds en purée !

 

Jim : Et mes yeux qui voient plus rien !

 

Jo : moi c’est le dos, j’ai mal partout, c’est dur de n’avoir rien pour dormir même une vieille paillasse ce serait le paradis, et puis ces foutus morpions ils z'ont pris mon dos pour un terrain de camping, et puis c’est vrai que je pues.

 

Jim : je sens plus rien !

 

Jo : Quoi tu rigoles même moi ça m’incommode !

 

Jim : en fait je sens vraiment plus rien, quand je t’ai dit que tu puais en fait j’en sais rien, j’ai perdu l’odorat, c’est con je sens même pas ce qu’ils nous font à bouffer, c’est de l’agueusie ! plus d’odorat, plus de goût, plus de vue, c’est l’angoisse je suis plus qu’un vieux déchet !

 

Jo : l’agueusie ! et depuis quand ?

 

Jim : depuis que je vois plus rien ! ce doit être le choc ! des fois j’ai l’impression de sentir mais je crois que c’est plutôt un délire, comme quand je vois le petit gros !

 

Jo : hein ? quel petit gros ?

 

 

Scène 4 La boite

 

On entend des bruits de pas et des personnes qui parlent.

 

Jim : écoute, ils arrivent !

 

Jo : qu’est-ce qu’on fait ? se lève soudain

 

Jim : Qu’est-ce tu veux qu’on fasse ! on creuse un petit trou et on se cache la tête dedans ? c’est pas encore l’heure ? j’vois pas la lumière.

 

Jo : le soleil est pas loin ! mais je pense pas que ce soit pour maintenant !

 

bruit sourd d’une trappe qui s’ouvre et d’un verrou  qu'on ferme, puis le bruit de quelque chose qui tombe.

 

Jim : C’est quoi Jo ? c’était quoi ce bruit ?

 

Jo : J’en sais rien ? arrête de prendre ce ton tu me fous la trouille ! je vais voir !il sort………c’est une boite !

 

Jim : comment ça c’est une boite ?

 

Jo : Une boîte en fer, elle a l’air pleine ! t’avais une boîte, toi en arrivant ici ? il tient la boîte comme une chose dangereuse

 

Jim : j’en sais rien, je te rappelle que je ne me souviens de rien j’ai atterri là, sans souvenirs ! mais ouvre-la bon sang ! et dis-moi ce qu'il y a dedans !

 

Jo : ben je sais pas si je dois...

 

Jim : viens t’asseoir près de moi… donne ! Il lui tend la boîte et s’éloigne comme si celle-ci allait exploser… ben c’est vraiment une boîte !

 

Jo : je te l’ai dit que c’était une boîte tu croyais quoi ? qu'ils m’avaient donné un entrecôte sauce roquefort, mais bordel  Jim ça m’avancerait à quoi de te raconter des cracs ?

 

Jim : mais t’en as tellement raconté ! comment tu veux que j’aie confiance, j’vois rien, je suis qu’un légume alors c’est pas bien difficile de se foutre de ma gueule !

 

Jo : ça me fait de la peine que tu puisses penser un truc pareil Jim, ça va faire 6 mois qu’on est coincé ici, je pensais que t’avais confiance en moi !

 

Jim : au lieu de palabrer ouvre ! il lui tend la boîte , ils vont se l’échanger durant plusieurs répliques

 

Jo : je sais pas Jim, j’ai la trouille ! qu’est-ce qu’ils ont pu mettre dedans hein ?

 

Jim : peut-être un bout de cadavre ? qui sait y sont assez tordus pour ça !Peut-être une tête... tu crois que ça passerait une tête ?

 

Jo : ho non pas une tête ! j’veux pas ouvrir, je trouve ça louche !

 

Jim : tu vois, tu ouvres, c’est la règle !

 

Jo : hein ?

 

Jim : Et oui c’est la loi, c’est mon privilège, je vois rien alors j’ouvre pas, mais y’a peut-être des choses excitantes à l’intérieur, allez ! ouvre ! T'as la trouille alors que t’as déjà dégommé des tyeps à bout portant, tu te fous de moi, là, non ?

 

Jo : et si y’a des horreurs c’est pour ma pomme.

 

Jim : et oui ! Ah oui une chose avant, si c’est des horreurs comme tu dis alors ne me dis rien tu seras gentil.

 

Jo : je sais ! on va le faire à deux ! toi tu ouvres, moi je regarde !

 

Jim : et si c’est un serpent ou quelque chose dans le même genre tu te casses à l’autre bout du trou, et je reste seul avec la bête.

 

Jo : ben vu la taille de notre nid d’amour, je risque pas d’aller bien loin !

 

Jim : Non, non je ne suis pas d’accord, avec toutes les saloperies qui me sont arrivées depuis que je te connais, celle-ci sera de trop, jusqu’ici tu as eu plus de chance que moi, il faut bien que la roue tourne un peu. Tu la prends tu l’ouvres et tu me racontes, enfin si c’est pas trop immonde ! Allez un peu de courage bon sang ! demain tu sera mort alors ça changera quoi ?

 

Jo : arrête ! Arrête ! j’te l’ai déjà dit, j’veux plus l’entendre !

 

Jim : alors ouvre-la ou je t’en parle jusqu'à l’aube !

 

Jo : Ok, je vais l’ouvrir

 

Jim : alors ?

 

Jo : ….

 

Jim :Alors ? ! ! JO ! Hé ! Jo tu vas me répondre ? tu l’as ouverte oui ou merde !

 

Jo ouvre il découvre une photo, un flingue, une clope…

 

Jo : ben je comprends pas !

 

Jim : Tu comprends pas quoi ?

 

Jo : tout ! ! la boîte et ce qu’il y a dedans !

 

Jim : et il y a quoi dedans ?

 

Jo : c’est ça qui est bizarre !

 

Jim : tu vas me le dire ! Oui ?

 

Jo :il sort les objets evec une grande delicatesse Une vieille photo d’un couple,  le jour de leur mariage sans doute, mais y’a pas de robe de mariée ni de sourires, dans le fond il y un paysage tout plat, une lettre mais je ne comprends pas ce qui est écrit, c’est une drôle de langue, un peigne, une montre mais elle doit pas être à l’heure, je suis même pas sûr qu’elle marche , un vieux bonbon... un vieux flingue du genre western avec une balle, et…

 

Jim : et quoi ?

 

Jo : une …clope !

 

Jim : Oh merde une clope, une vrai ? j’peux la sentir ? Donne !

 

Jo : fait attention y’en a qu’une il hésite, ne lui tends pas, la renifle

 

Jim : ils auraient pu en mettre deux, quel bande de rats ! Eh, vous, là haut ! vous m’entendez, c’est quoi le délire, qu’est-ce que vous voulez qu’on en fasse de vos saloperies ? Donne-la moi je te promets que je ferai attention ! Jo lui donne, Jim la renifle avec délectation   Ho j’me sent tout ému, six mois que j’en ai pas touché une ! humm elle sent bon la garce ! C’est au moins une blonde, une bien roulée avec un mini filtre ! j’vais me la fumer jusqu’au trognon

 

Jo : On va se la fumer jusqu’au trognon !

 

Jim : Donne-moi du feu !

 

Jo : j’ai pas de feu

 

Jim : non attends, tu veux dire qu ‘ils nous ont mit une clope et c’est tout ?  Sans feu ? Et on fait comment pour l’allumer !

 

Jo : j’en sais fichtre rien ! On peut toujours leur demander de nous en envoyer, on sait jamais ils l’ont peut-être pas fait exprès après tout c’est peut-être juste un oubli !

 

Jim : oui bien sûr un oubli ! C’est leur petit jeu ! tient si on leur mettait la cigarette du condamné sans feu on se marrerait bien ! C’est un jeu c’est ça ! On est juste des marionnettes, des souris de labo ! Poussons l’être humain le plus au fond possible, et après on regarde se transformera t-il en animal, l’homme est-il bien une bête, si on le prive de tout ? Et le flingue c’est pour quoi ? C’est pour savoir lequel se déglinguera le tête le premier, lequel sera suffisamment égoïste pour laisser l’autre vivre ce cauchemar seul, ou alors lequel aura le cran et le courage de buter l’autre !

Remarque je suis con, de toute façon demain on sera claqué tout les deux ! Je suis fatigué Jo, je veux me réveiller, c’est pas possible c’est pas ma vie, je dois me réveiller vite ! …….Y’a rien d’autre?

 

Jo: je peux manger le bonbon ?

 

Jim: non on fait moit'-moit'.

 

Jo: mais c’est un bonbon dur ! Et puis il a l’air vieux il est tout collé de vieille miettes.

 

Jim: Ben s'il te dégoûte moi je le prends !

 

Jo: Non ! J’en suce la moitié et je te le donne!

 

Jim: C’est hors de question ! Ou c’est moi qui commence, je te connais t’es capable de l’avaler tout rond!

 

Jo: Bon je vais essayer de le casser en deux! Il prends le flingue et donne des coups sur le bonbon!

 

Jim: tu tapes avec quoi là ?

 

Jo: avec le dos du flingue, pourquoi?

 

 Jim: t’as enlevé la balle avant !?

 

Jo: enlève discrètement la balle Bien sûr, chuis pas si con!

 

Jim: tu m’as parlé d’une photo, y’a quoi au juste dessus ?

 

Jo: j’te l’ai dit un couple qui fait la gueule ! il regarde la photo avec beaucoup d’attention

 

Jim: alors là je comprends pas ?

 

Jo: parce que le reste tu comprends?

 

Jim: d’une certaine façon oui ! il prend la boîte enlève son bandeau et essaye un à un de regarder les objets sans succés

 

 

Scène 5 La dernière volonté

 

Jo : Tu vois Jim si j’avais une dernière volonté j’aimerais bien avoir ta cervelle une heure ou deux pour comprendre comment tu fais pour tout piger aussi vite , j’ai toujours l’air idiot. Quand j’te cause tu captes tout de suite avant même que j’ai eu le temps de comprendre la question.

 

Jim: Tu vois, si j’avais une dernière volonté, je demanderais pas quelque chose d’aussi inutile, peut-être que je réfléchis vite, mais ça m’empêche pas d’être dans la même merde que toi !  t’y gagnerais pas au change, demande quelque chose de plus excitant, une bouteille de whisky par exemple, pour se soûler une dernière fois , retrouver un peu d’insouciance. Tu vois j’ai qu’un souvenir de ma vie  ! Je sais pas si c’est normal de se souvenir de choses comme ça, mais je sais que celui-ci est très précis. C'est un souvenir de quand j'étais mino, Je suis dans un café, une femme est assise à coté de moi, elle me jette des regards, mais c’est pas des yeux d’amour tu peux me croire, c’est plutôt de la haine, elle se marre et me jette, “ qu’est-ce que tu as à me regarder comme ça toi?  T’as déjà fait assez de mal comme ça , tire-toi ailleurs, va voir si j’y suis ! “ j’ai de la peine, j’ai même envie de chialer, mes yeux ne peuvent se détacher d’elle, j’ai l’impression qu’elle va me retourner un rouste, mais elle préfère me balancer une poignée de cacahuètes sur la tronche, je me sens mal, alors je sors, je vais dans la rue, y’a une odeur de friture et d’été, dehors c’est la nuit, y’a du monde, vachement de monde même, une sorte de foule est rassemblée autour d’une bagarre, deux types se foutent des ramponneaux à en crever, je vois des bonhommes qui s’échangent des billets, j’ai envie de passer cette petite foule, mais elle est compacte et j’ai un mal fou à m’en dégager, je sens soudain une main sur mon épaule, c’est un grand brun qui me jette des regards amusés, comme si j’étais une poupée. Il me force à rester avec lui et à regarder la baston, il pue le cigare bon marché et l’alcool, les deux types qui se bastonnent y vont de plus en plus fort, ils mordent et tapent plus fort à chaque coup, je suis impressionné, je sans monter la colère en moi, je ressens l’agressivité qui se dégage de ces deux fous, ils sont décidés à se battre jusqu’à la mort, les autres les encouragent, applaudissent  et crachent, je vois des billets de banque, des mains, des visages hilares, je ne sais pourquoi, mais j’ai l’impression que le type qui me retient, va bientôt me jeter au milieu de la bagarre et j’ai très peur, il me chuchote à l’oreille, “ c’est pas ta faute t’y es pour rien ! ” Je finis par me dégager de ses grosses mains, je file,  me retourne pas, cours, ça me défoule, je sais pas où je vais, mais j’y vais , je me retrouve seul dans un terrain vague, il y a des bouteilles d’alcool et un vieux clochard qui dort, je lui  pique une bouteille, et je me force à boire C’est une horrible piquette qui me brûle la gorge, mais j’ai le sentiment qu’il faut que je me saoûle pour oublier, mon souvenir s’arrête là, je ne sais pas pourquoi il est resté. Et aussi clair que si ça m’été arrivé hier.

 

Jo: Ouais c’est pas mal comme voeu ça!

 

Jim: dans ces moments là, y’a que l’alcool!

 

Jo: L’alcool pour ce saoûler ? non pas ça ! le problème c’est que je ne supporte pas ça, ça me donne des brûlures d’estomac et puis il ne m’en faut pas beaucoup, j’ai surtout l’alcool triste, non en fait je crois qu’une femme, c’est ça que je demanderais, m’envoyer en l’air une dernière fois, mais avec une femme dont je serais amoureux, tu vois je crois que c’est mieux qu’une cuite, sentir de l’amour dans ses yeux, être amoureux comme un ado et sentir que tu touches plus terre, je voudrais penser que je vais manquer à quelqu’un quand je serais plus là. 

 

 

Jim: tu faisais quoi avant ?

 

Jo: avant quoi?

 

Jim: avant d’être un salaud !

 

Jo: c’est pas intéressant!

 

Jim:  ben moi ça m’intéresse!

 

Jo : et depuis quand tu t’intéresses à moi

 

Jim: j’ai envie de parler!

 

Jo: tiens les rôles s’inverses ! C’est marrant !

 

Jim: Alors avant tu traînais tes nipes où donc

 

Jo: j’ai pas été une ordure toute ma vie, je suis même pas sûr d’en être une tu vois je suis comme toi je me persuade que le monde ne perdra rien et que je suis un rebut de la société.

 

Jim: ça me dit toujours pas ce que tu faisais avant .

 

Jo: j’étais photographe

 

Jim: non?

 

Jo: ben si !

 

Jim: et tu photographiais quoi !

 

Jo: j’étais même pas mauvais, mais je suis allé trop loin

 

Jim: alors là tu m’en bouches un coin, je t’imaginais plutôt dans l’import-export de petites magouilles et compagnie.

 

Jo: ben non tu vois, j’ai débuté chez un type qui faisait des photos de classe c’était sympa, tous ces mômes qu'y fallait faire sourire, je devais me déguiser et les faire se marrer, une vrai bouffée d’oxygène, j’avais un grand chapeau de mexicain et un nez de clown, je faisais des grimaces d’horreur ils étaient pliés de rire, je me faisais engueuler par mon boss parce que les gamins qui se tordent de rire sur une photo de classe ça fait toujours tache, les parents y préfèrent voir les enfants sérieux à l’école, même s'ils font une tête de six pieds de long.

 

Jim: Tu t’es pas retrouvé ici parce que tu faisais des photos de classe ?!

 

Jo: ça rapportait que dalle, c’est dommage j’aurais peut-être pas mal tourné si j’avais continué de travailler avec des mômes, après j’ai bossé pour un labo, là c’était pas excitant, je développais les petits bonheurs de tout le monde, les vacances, les anniversaires, les noëls c’était le pire, tu comprends moi j’ai jamais eu de famille je suis tout seul depuis tout petit  alors le bonheur des grandes familles souriantes sur papier glacé ça me donnait envie de vomir, parce que je savais que ça m’arriverait jamais à moi d’en avoir une de famille! alors une grande! C’est vrai je suis un solitaire, j’ai jamais réussi à supporter une bonne femme ou c’est plutôt elles qui ont jamais réussi à me supporter,

 

Jim: ça se comprends

 

Jo: Quoi?

 

Jim: Non, non rien, continue

 

Jo: c’est drôle d’ailleurs t’es la seule personne avec qui j’arrive à vivre, dommage que tu sois pas une femme! Il voit Jim plié en deux Qu’est-ce qui t’arrive ?

 

Jim: Rien, c’est rien je t’assure, t’occupe pas de moi, continue ton histoire, ça me fait du bien, je pense à autre chose quand tu parles.

 

Jo: t’es sûr ? Bon j’en étais où ? Ah oui , un jour j’ai eu des photos qui n’avaient rien à voir avec celles que j’avais d’habitude, c’étaient des photos chocs, des types brûlés après une explosion ou des cadavres dans un fossé, ça m’a vachement troublé et j’ai voulu rencontrer le type qui faisait ça!

 

Jim: le type ou la nana!

 

Jo: non ce pouvait pas être une femme c’étais trop horrible comme image y’a qu’un type pour pouvoir photographier ça et venir tranquillement dans un laboratoire de grandes surfaces.

 quand il est venu les cherché il avait une tête normale, pas du genre vicelard ou sadique, il avait pas une tronche d’aventurier non plus, alors je l’ai abordé et je lui est demandé ce qu’il faisait, et là y m’a dit qu’il travaillait pour des magazines people qui voulaient des photos dans le même genre! Que ça rapportait un max de blé et qu’on était pas nombreux à faire ce bouleau, j’ai pas réfléchis plus longtemps..

 

Jim: Ah tient étonnant !

 

Jo: ben non! je me suis dit, mon petit Jo, t’as rien qui te retient ici, alors fonce, je me suis payé un bon appareil et je me suis dirigé là ou c’était le plus la merde! J’ai vu les choses les plus difficiles que j’ai jamais vues, je pensais en avoir vu pour mon compte mais j’en étais très loin, je crois que c’est là  que j’ai pété un plomb !   

 

Jim: c’est quoi , Jo, qui t’a fait péter un plomb ?

 

Jo: Je faisais des photos de conflits c’est celle qui rapportent le plus, forcément les gens s’imaginent à l’abri alors quand ils voient des images de guerre ils se rendent compte que ça arrive vraiment ça leur fait des montes d'adrenaline, et la peur c'est vendeur. Je me suis retrouvé dans une embuscade, des bonhommes tiraient de partout,  j’étais comme un con au beau milieu des coups de feu ,je me suis retrouvé paumé là au beau milieu de cette merde, c’était pas ma guerre, j’étais ni avec, ni contre eux, mais eux m’ont pris pour cible, chacun pensait que j’étais l’autre. Je me suis planqué derrière une vieille bagnole, et j’ai attendu, un bon bout de temps, je me suis presque endormi, c’est le contact froid d’une arme à feu sur la tempe qui m’a fait sortir de ma torpeur. Le mec me tenait en joue, je pense qu’il allait tirer, je sais pas ce qui l’en a empêché, sans doute parce que je sortais d’une phase de sommeil et que j’avais pas eu le temps d’avoir peur, il avait l’habitude de voir des  types terrorisés au bout de son canon et là il avait en face de lui, un mec qui avait la tête dans le cul, et qui s’avait pas ce qui lui arrivait. Je lui ai pas laissé le temps de réfléchir, il a baissé son flingue, je me suis jeté sur lui, il a été tellement surpris qu’il a rien eu le temps de dire, son feu est parti de sa main, je l’ai pris et j’ai tiré au milieu de son  front, j’avais jamais buté quelqu’un, mais là, le mot a soudain eu une vrai signification. Quand tu as tué quelqu’un, la vie a soudain plus le même sens, c’est si simple et si affreux en même temps, y’avait du sang partout, j’ai eu un haut le cœur , mais j’avais rien à vomir, je suis resté comme un con devant son corps durant une demie journée, et puis soudain tout s’est éclairci, j’avais une arme c’était la guerre, si on me cherchait on me trouverait, et on m’a souvent cherché, c’est pour ça que je suis ici ! J’ai eu le temps d’y repenser depuis six mois, le pire c’est que tous les mecs que j'ai butés, j’ai leurs visages encore là! chaque visage au moment où y z-ont compris que c’était  la fin, leur expression du renoncement.

 

Jim: je sais pas ce que j’ai mais là ça me fait vraiment mal

 

Jo: où t’as mal !

 

Jim: au ventre, c’est pas nouveau j’ai déjà eu mal, mais là c’est beaucoup plus fort!

 

Jo: tu veux boire?

 

Jim: t’as de l’eau ?

 

Jo: oui, j’en garde toujours un peu !

 

Jim: avec ce qu'ils nous donnent, t’arrives à en garder ?

 

Jo: je fais des économies pour tout, je suis comme ça! même pour l’eau, je me suis dit qu’il nous en donnerait peut-être de moins en moins.

 

Jim: donne juste une goutte!

 

Jo: tiens , t’as qu’à tout boire c’est pas grave ça me fait plaisir! Tiens ! Boit pas trop vite ! y’en a que très peu .

 

Jim: merci Jo !

 

Jo: hé! Vous m’entendez vous là haut y’a mon copain qui a besoin d’aide ! Il a mal au ventre !

 

Jim: laisse tomber Jo, ils s’en foutent ! et puis ça va mieux ! Ton eau elle m’a fait drôlement du bien.

 

Jo: mais moi j’ai pas envie de laissé tomber, c’est pas humain de laisser un homme dans cet état! Tu peux pas crever comme ça il faut que tu sois en pleine forme, pour que le moment venu y sentent qu’ils tuent un homme, un vrai, au mieux de sa forme ; il faut qu’ils sentent que c’est un crime, si t’es pas en forme y auront pitié, ce sera presque te rendre un service que de t’achever , alors moi j’ai pas envie de leur laisser croire que tuer un malade c’est pas vraiment tuer.

 

Jim: T’es un mec fièr, Jo!

 

Jo: et c’est pas bien d’être fier ?

 

Jim: ça dépend des fois! y’a des jours ou il vaut mieux être humble, mais des jours comme aujourd’hui, ben t’as raison d’être fier. C’est vrai que moi aussi j’vais pas les laisser penser que c’est bien de me tuer, je pourrais pas les regarder dans les yeux vu que je ne vois plus rien mais je ferais semblant et je serai fier moi aussi, peut importe ce que j’ai fait avant, peut importe l’état dans lequel je suis, y verront dans mes yeux qui je suis et y z'en pisseront dans leur froc.

 

Jo: Ouais Jim! Y vont chialer leur mère quand on les regardera et qu'y verront qu’on n'a pas peur !

 

 

Scène 6 Le dernier repas

 

On entend un bruit

 

Jim:  C’est quoi ça?

 

Jo: Je te rassure ! y fait pas encore jour ! Mais ça ne devrait pas tarder

 

Jim: ils vont encore nous apporter quelque chose ?

 

Jo: je vais voir!

 

Jim :attend! bouge pas, ils approchent.

 

Jo: je me fais tout petit, encore plus minuscule qu’un morpion ! ils me verront pas  .

 

Jim : quoi?

 

Jo: Je jette un oeil c’est tout !

 

Jim: c’est peut-être une autre boîte ?

 

Jo: une boîte pour moi, la première c’était la tienne et celle-ci c’est la mienne.

 

Jim: pourquoi la première serait à moi ?

 

Jo: Ben on comprenait rien de ce qui avait dedans, alors j’en déduis qu’elle devait sûrement être à toi, parce que si elle avait été à moi j’aurais forcement pigé les trucs qu’y avait dedans.

 

Jim: ça se tient, j’en déduis donc, à mon tour, que la deuxième partie du bonbon était à moi .

 

Jo: tais-toi ils approchent!

 

Jim: va voir!…..Alors?

 

Jo : Alors là, j’en reviens pas ! C’est le repas ! À cet heure ci ! Je pensais qu’ils nous donneraient rien à manger vu qu’ils vont nous zigouiller dans quelque heures !

 

Jim: c’est notre dernier repas!….. Ils ont mis quoi?

 

Jo : comme d’habitude, de la bouillie, du pain et un fruit.

 

Jim: un fruit ? C’est une première ! Et c’est quoi le fruit ?

 

Jo: J’en sais rien c’est la première fois que j’en voies des comme ça ! Il lui tend Tiens !

 

Jim: je vois pas non plus, ce doit-être un fruit de chez eux!

 

Jo: c’est peut-être ça l’execution ?

 

Jim: Quoi ça!?

 

 Jo: Un fruit toxique, on en mange et demain on est raide mort!

 

Jim: Et ben tant mieux! Ca me plait bien moi, de mourir à cause d’un fruit, tu vois, toi, c’est les oliviers et bien moi c’est les fruits.

 

Jo: il paraît que les champignons vénéneux ce sont les meilleurs!

 

Jim: Pourquoi tu me dis ça ?

 

Jo: à cause du fruit, s'il est vénéneux, il doit-être drôlement bon!

 

Jim: Ouais ! C’est notre dernier repas il faut qu’il soit parfait!

 

Il enlève sa chemise pour en faire une nappe, Jo place le plateau sur des petites pierres, ils font une déco qui a du style mais qui reste pitoyable, il faut sentir de la joie dissimuler une grande inquiétude et une tristesse, il faut que ça reste pathétique. ils jouent aux enfants qui font de la dînette.

 

Jim: Je vois rien mais je suis sûr que c’est beau!

 

Jo: C’est encore mieux Jim c’est épatant! J’ai l’impression de redevenir un enfant, on fait des paupiettes de veau avec trois cailloux et deux feuilles de platane.

 

Jim: sers moi un coup !

 

Jo: tout de suite Jim! On trinque ?

 

Jim: à ta santé Jo !

 

Jo: à ta santé Jim! Au fait ça va mieux le ventre?

 

Jim: Je fais aller ! Oui ça va mieux ! Ils trinquent

 

Jo: à la vie !

 

Jim: à la vie qui continue!

 

Jim: à ce putain de trou qu’on va quitter pour en rejoindre un autre !

 

Jo: aux femmes

 

Jim: à l’humanité qui nous laisse tomber!

 

Jo: Ouais c’est ça , allez à ta santé Jim!

 

Jim: à la tienne!

 

Jo: C’est vraiment pas bon, je n’arrive pas à m’y faire depuis six mois!

 

Jim: Comme quoi ! “On se fait à tout ” Ben, c’est pas vrai ! Ca par exemple c’est pas possible! Alors que dormir par terre et bien je m’y suis fait, j’ai même moins mal au dos qu’avant.

 

Jo: j’arrive pas à en avaler une bouchée

 

Jim: essaye d’imaginer que tu manges de la pâte à gâteau pas cuite, c’est psychologique, mais tu verras ça marche , c’est bien meilleur.

 

Jo: C’est pas ça !

 

Jim: c’est quoi alors ?

 

Jo: J’ai pas l’appétit

 

Jim: pense à autre chose !

 

Jo: a quoi tu veux que je pense ? le soleil innonde la pièce

 

Jim: Je sais pas moi? Un bon souvenir! t’as quand même un bon souvenir dans ta chienne de vie ? 

 

Jo: pas si sûr ! Et puis je n’y arrive pas ! je bloque! J’ai du mal à imaginer que ce repas je vais pas avoir le temps de le digérer!

 

Jim: tu vas pas me laisser seul ? Je veux pas faire mon dernier repas seul, allez, si tu manges pas, fait au moins semblant.

 

Jo: s'énerve j’arrive pas Jim je suis désolé!

 

Jim: t’emballe pas Jo, c’est pas grave! Tout va bien ! On a encore tout notre temps, si tu manges pas  maintenant, tout à l’heure tu auras peut-être faim.

 

Jo: c’est pas si simple Jim!

 

Jim: tu me caches quelque chose Jo!

 

Jo: Le soleil!....... Je viens de recevoir un rayon de soleil, c’est l’heure ! Ils seront là d’un instant à l’autre,! C’est la première fois que j’ai si peur du soleil

 

Jim :il enlève son bandeau tien met le bandeau sur tes yeux, fait comme si c’était encore la nuit! Moi je le vois pas le soleil, alors on va se le faire ce dernier repas! OK

 

Jo: ça me fait flipper d’avoir un bandeau sur les yeux, désolé de te dire ça, mais je trouve que ça fait condamné à mort, tu sais sur les tableaux des peintres y’a toujours un mec devant quinze types qui le flinguent et lui il a un bandeau sur les yeux.

 

Jim: et bien ferme les yeux! C’est pareil.

 

Jo: je ne peux pas! Je suis trop tenté de les ouvrir .

 

Jim: j’ai une idée, tu vas te passer mon mouchoir sur les yeux, c’est pas un bandeau, c’est un mouchoir, avec de la dentelle, un mouchoir de fille ! Je sais pas à qui il a appartenu, mais il est propre je te le promet, il sens encore le parfum, j’en suis sûr !

 

Jo: je savais pas que t’avais un beau mouchoir!

 

Jim: quand j’ai trop le cafard je le sort et j’imagine la fille qui va avec !

 

Jo : donne ! Il sens pas la rose !  plutôt la transpiration !

 

Jim: déçu Ah !

 

Jo se ravisant : En fait y’a un petit parfum de fleur quand on renifle bien ! Il a du appartenir à une sacrée jolie fille!

 

Jim: j’en suis sûr et certain ! Alors tu acceptes de  le mettre ? Imagine! tu mets la jolie fille autour de toi, c’est comme si c’était elle qui te bouchait les yeux avec ses mains.

 

Jo: Dans ces conditions !!

 

Jim: je te l’attache

 

Jo: je vois presque plus rien ! Juste des lueurs !

 

Jim: C’est comme moi! Alors maintenant imagine que tu es dans un grand restaurant !

 

Jo: Dans lequel?

 

Jim: Ben j’en sais rien ? Y’en a pas un dans lequel tu aurais aimé manger !

 

Jo: y’en a un qui était juste à côté de ma piaule, rue Montesquieu, “ le Saint Jacques ”, c’est un  restaurent chic avec de grandes baies vitrées et de grosses tentures grises et rouges, on ne voit presque pas l’intérieur de dehors, mais quand la porte s’ouvre on découvre une ambiance feutrée, toutes les tables sont bien décorées avec des chandeliers à l’ancienne, je suis sûr que ce doit-être superbe là-dedans, il faut lever le petit doigt et être clean , la bouffe doit-être sublime, tu dois manger des petits chefs d’œuvres! En général y’a rien à becter dans les assiettes mais tu t’en prends tellement plein les yeux et les papilles qu’il ne vaut mieux pas qu’il y en ait de trop.

 

Jim: on est invité au Saint Jacques aujourd’hui ! C’est une soirée un peu spéciale, écoute ils nous ont mis la valse triste de Sybelius

 

Jo: c’est quoi!

 

Jim: c’est un classique, c’est une musique triste est belle.

 

Jo: Et ça donne quoi?

 

Jim: Il chante la valse triste de Sybelius  au début c’est comme le battement d’un cœur triste très lent , les violons viennent lentement se superposer, une jeune femme danse seule, elle imagine qu’elle serre dans ses bras son mari ; la valse prend de l’ampleur, on entend des flûtes, la valse s’emporte, elle danse de plus en plus vite, elle est emportée dans son mouvement, puis comme une respiration la musique retombe comme emportée par le vent La jeune femme ne se rend pas compte qu’elle serre dans ses bras la mort, alors les violons s’affolent, la valse devient tragique, puis lentement le souffle retombe, les violons deviennent des murmures de tristesse. C’est tragique mais tellement beau, il y a des musiciens qui jouent juste pour nous, regarde près du bar, trois serveurs attendent qu’on passe commande, la lumière est douce et orange, tout autour de nous il n’y a  que des amis, on entend leurs chuchotements, le bruit des verres qui s’entrechoquent, ils nous aiment, ils sont là  pour nous, sur la table il y a une bouteille de vin, un bon millésime.

 

Jo: C’est la première fois que j’en boit !

 

Jim: Je t’en sers ?

 

Jo: Allez mon gars et ne soit pas radin!

 

Jim: on trinque?

 

Jo: à ta santé Jim, et à vous tous mes amis!

 

Jim: à toute la vie qui nous attend en sortant du restau!

 

Jo: des femmes, des brunes, des blondes, des rousses!

 

Jim: à tous les projets les plus fous!

 

Jo : je vais moi aussi ouvrir un petit restau sur un bord de mer

 

Jim: Moi j’épouse une femme et je lui fait quatre gosses!

 

Jo: je l’appellerai “ chez Jo ” ! Tu seras le bienvenu, et tu mangeras à l’œil quand tu voudras ! ils s’appelleront comment tes gosses ?

 

Jim: Gontran pour le plus grand ! Élisée pour la fille, Crépin et Dimitri pour les plus petits.

 

Jo: c’est joli !

 

Jim: et tu serviras quoi dans ton restau ?

 

Jo: des fruits de mer et des sandwichs italiens !

 

Jim: c’est un beau projet, je suis sûr que ça peut marcher .

 

Jo: et toi tu vas faire quoi ?

 

Jim: Je serai un petit artisan, un ébéniste. Je ferais des tables, des armoires où les enfants pourront se cacher !

 

Jo: moi j’en ai fini de la photo ! Je veux avoir un petit job tranquille, fini les reportages ! Les images chocs ! Les équipes foireuses !

 

Jim: qu’est-ce que t’as dit là?

 

Jo: fini les équipes foireuses !

 

Jim: tu travaillais en équipe ?

 

Jo: ouais!

 

Jim: mais ton coéquipier, il est devenu quoi?

 

Jo: il a filé, bien avant les grands chamboulements.

 

Jim: quelles chamboulements !

 

Jo: le renversement du parti politique ! Et l’explosion du deuxième champignon!

 

Jim: du deuxième champignon?

 

Jo: la bombe atomique !

 

Jim: mais c’est quoi ce bordel ! Pourquoi je me souviens de rien y’a eu une explosion atomique mais où?

 

Jo: Dans un pays de l’Est  un nom compliqué j’ai oublié, j’ai une très mauvaise mémoire des noms. Enfin ça c’est passé il y a un bon moment.

 

Jim: mais pourquoi tu ne m’en as jamais parlé?

 

Jo: je pensais que tu le savais que tu t’en souvenais ! C’est tellement énorme comme truc !

 

Jim: mais alors on est en guerre?

 

Jo: Ben oui, oh merde je pensais que tu le savais, j’aime pas annoncer des choses pareilles.

 

Jim: mais c’est quoi cette guerre?

 

Jo: il enlève son bandeau c’est compliqué, je n’ai pas tout compris, je crois que personne ne comprend rien d’ailleurs! Ça a commencé il y a 3 ans , des histoires politiques, économiques, les gouvernements ont commencé à se tirer dans les pattes pour des intérêts généraux. Les pays les plus riches se sont écroulés économiquement lorsqu’ils ont découvert le moyen de rouler sans pétrole, de chauffer sans gaz et sans électricité par une source d’eau de mer, le premier venu pouvait avec un litre d’eau de mer chauffer sa maison pour un an, rouler durant des milliers de kilomètres, alors ils ont fermé tous les bords de mer, le tourisme dans certains pays s’est transformé en marché industriel, tu pouvais aller te baigner, mais interdiction de ramener de l’eau de mer chez toi, les gens devenaient fous, il creusaient des tunnels jusqu’à la mer, se fabriquaient des maillots de bain avec des poches intérieures pour voler à chaque baignade un peu de ce précieux liquide. Et puis soudain ça a été la révolte, le peuple n’en pouvait plus il a éclaté…  et puis ces conflits en ont amené d’autres, maintenant tout le monde se tape sur la tronche sans savoir pourquoi toutes les jalousies d’un pays à l’autre d’une religion à l’autre... C’est devenu très compliqué, c’est une guerre qui n’est pas prête de finir je te le dis, plus personne ne sais avec qui on est en conflit, ça change d’un jour à l’autre, les trois types qui étaient avec nous c’étaient des suisses, tu vois même eux ils ont perdu leur neutralité, enfin c’est pour dire il est possible qu’ils aient été libérés ou tués selon le conflit du jour. Nous c’est un peu différent, c’est tellement compliqué qu’ils ne devaient plus savoir s'ils étaient avec ou contre nous et je crois que nous venons de pencher contre.

 

Jim: arrête je ne veux plus rien savoir!

 

Jo: je sais c’est difficile à croire, mais c’est la triste réalité!

 

Jim:  tais toi! Regarde ils nous ont servi nos langoustines, des fruits de mer comme dans ton futur restaurent. C’est divin!

 

Jo: tristement oui c’est très bon!

 

Jim: j’espère que le dessert sera chocolaté! j’adore le chocolat!

 

Jo: j’en suis sûr Jim, je le vois déjà, une énorme forêt noire, avec deux cerises sur le dessus, tu reprendras bien un peu de vin ?

 

Jim: tu l'aimes  ?

 

Jo: Je trouve ça délicieux !

 

Il mangent en silence Jim est tout souriant il a vraiment envie d’y croire, Jo lui est triste il joue le jeu pour Jim, la joie du début redescendant petit à petit pour retrouver un ton grave, le repas se termine .

 

Jim: Mais qu’est-ce que je fais ici moi ?

 

Jo: Je crois que j’aurais dû la fermer un fois de plus! À dire vrai je m’en doutais que tu ne savais rien, mais j’étais jaloux, t’as peut-être rien, mais t’as été quelqu’un c’est sûr ! Alors que moi je suis juste un pauvre con qui n’a pas été assez malin pour se barrer le plus loin possible de tout ce merdier! Je l’ai cherché ce trou. Je suis allé regarder la bête droit dans les yeux pour mieux attraper son image, pas étonnant qu’elle m’ait avalé tout rond!

 

Jim: tu es jaloux de moi ?

 

Jo: y’à qu’à voir ton costume ! Évidement maintenant on ne se rend plus bien compte, mais c’est une grande marque, je pense même qu’il a été fait sur mesure, quand je t’ai vu je me suis tout de suite dit qu’il fallait que je fasse comme si on étais ensemble, je me suis fait passer pour ton sous-fifre, je pensais qu’ils me ficheraient la paie, j’ai peut-être eu tort, je sais pas.

 

Jim: On est dans le même bateau, ici il n’y pas de classe!

 

Jo: tu es toujours mieux que moi! Y’a un truc chez toi que j’ai pas, c’est tout !

 

Jim: moi aussi je suis jaloux de toi

 

Jo: NON!

 

Jim: et ben si, tu vois, tu sens, tu te souviens, le moment venu tu pourras te raccrocher à un souvenir heureux , alors que moi les seuls souvenirs que j’aie c’est ces six derniers mois ici.

 

Jo: tu te rappelleras notre dîner au “ St Jacques ” juste avant toutes ces vérités, le moment où l’on a fait tous ces projets.

 

Jim: tu crois en Dieu ?

 

Jo: Jusqu’à maintenant, plutôt non! Mais ce soir j’ai envie d’y croire ! Je me dis que si on y croit très fort peut-être qu’une force là-haut nous entendra et qu’elle nous prendra dans ses bras pour nous emmener dans un coin plus joli.

 

Jim: Moi je ne crois en rien. J’étais peut-être croyant avant mais maintenant je ne crois plus en rien,  tu vois Jo, c’est ça le pire, d’un coté je me dis que ce n’est pas plus mal de se dire que tout sera fini, et d’un autre je me dit que plus rien c’est quand même assez angoissant.

 

Jo: Si tu veux je peut dire une prière pour toi ! Moi je crois en quelque chose, qui est meilleur que nous, peut importe son nom, sa culture, je crois que l’homme ne peut pas être seul et s'il n'y avait plus rien après la mort, ce serait trop injuste pour tous les pauvres qui n'ont eu que des galères dans leur vie, au moins au paradis ou ailleurs on a tous la même chance.

 

Jim: C’est gentil de faire une prière pour moi.

 

Jo: C’est normal on est dans le même bateau, c’est toi qui l’a dit, y faut bien qu’on se serre les coudes

 

Jim: J’ai un aveu à te faire.

 

Jo: C’est quoi?

 

Jim: tu sais la belle brune que je vois ?

 

Jo: Ne me dis pas qu’elle existe pas ? Je t’en supplie !

 

Jim: Ben plus ou moins!

 

Jo: C’est à dire ?

 

Jim: Elle est pas vraiment telle que je te l’avais décrite.

 

Jo: Je m’en doutais qu’elle était pas aussi jolie que tu le prétendais.

 

Jim: C’est encore pire!

 

Jo: Quoi ? elle si moche que ça ?

 

Jim: Elle change tout le temps, mais ces derniers temps c’est un homme!

 

Jo: Oh non !

 

Jim: Ben si !

 

Jo: Mais pourquoi ?

 

Jim: J’en sais rien ! Un jour c’est une femme, un autre c’est un vieil homme, parfois il m’arrive même de voir un enfant, des fois je me dis que c’est un résidu de ma mémoire qui me revient par flash avec des gens que j’ai connus et qui reviennent. Si j’avais assez de temps, je suis persuadé que j’arriverais à refaire tout le puzzle, je suis sûr que j’arriverais à tout recoller dès que j’aurais vu tout le monde. En ce moment  c’est un banquier, il est gros et chauve!

 

Jo: C’est horrible! Et c’est qui d’après toi ?

 

Jim: peut-être mon père, en tout cas lui, ne voit pas qui je suis, c’est peut-être juste mon banquier.  Je sais pas pourquoi c’est lui que je vois ?  C’est pas de bol , j’étais avec une blonde il y a quelques temps c’est bête je n’ai pas pensé à lui donner mon nom, mais en fait Albert Drejim c’est peut-être pas mon nom après tout, j’en sais fichtre rien, je me suis réveillé avec ce nom en tête.

 

Jo: Mais pourquoi tu m’as dit que c’étais une gonzesse ?

 

Jim: La jalousie ! Et puis c’était compliqué de t’expliquer tout ça, j’avais peur que tu me prennes pour un taré, et puis merde mets-toi à ma place, c’est la seule chose que je vois, j’avais envie que ce soit beau.

 

Jo: Tu vois la lumière Jim

 

Jim: Oui je me suis rendu compte que c’était plus clair tout à coup.

 

Jo: J’ai pas envie de crever seul Jim, dis-moi que tu vas m’aider à passer l’épreuve!

 

Jim: Je suis là, on est là tout les deux et on va s’aider !

 

Jo: C’est vrai!

 

Jim: Mais oui !et puis tu sais t’es pas si insupportable que ça ! C’est vrai que tu causes et qu'on peut plus t’arrêter quand tu commences , mais en même temps ça fait du bien d’avoir quelqu’un qui parle.

 

Jo: C’est vrai ça ! t’aurais pu tomber sur pire, un mec qui décroche pas un mot ! C’est quand même plus vivant de parler !

 

Jim: C’est une belle journée de soleil ! C’est con de mourir quand il fait beau ! Je me dis que je ne pourrai pas en profiter jusqu’au bout.

 

Jo: C’est là qu’on se rend compte qu’on n'est pas grand chose !

 

Jim: Le soleil continuera de brûler des visages, la nuit tombera, la vie suivra son cours ! Rien n'aura changé pour la nature.

 

Jo: J’ai beau me dire que ma vie à été un ratage total, j’ai quand même la sensation que c’est passé très vite et qu’il y a eu de bons moments.

 

Jim: Tu deviens philosophe.

 

Jo: Ce doit-être ça !

 

Jim: Quand on meurt on revoit toute sa vie devant soit, ça me donnera un aperçu de toutes les choses que j’ai oubliées.

 

Jo: C’est bien Jim tu vois, c’est ça être positif dans le négatif.

 

Jim: J’ai bien appris ma leçon, je pourrais avoir un bon point ?

 

Jo: Tiens ton mouchoir Jim, je veux recevoir le soleil sur mon visage.

 

Jim: Moi aussi je veux le sentir !  amène moi devant.

 

Jo: Jim ?

 

Jim: oui Jo ?

 

Jo: y’a un nom sur ton mouchoir et deux phrases, je n’arrive pas à lire c’est très effacé.

 

Jim: qu’est-ce que tu me racontes ?

 

Jo:  François Romain, c’est ton prénom et ton nom ! c’est pas un mouchoir de fille! "Ne m’oublie pas, Catherine. 1256 route des arbres assis" , c’est où ça ?

 

Jim: François Romain ? ça me dit rien ...

 

Jo: moi si !

 

Jim: c’est qui ?

 

Jo: Si c’est toi t’es en effet quelqu’un d’important, mais je ne pourrais pas te dire si c’est toi vu que je ne l’ai jamais vu.

 

Jim: c’est qui ?

 

Jo: C’est une personne qui à été envoyée pour négocier dans les conflits, j’ai entendu parler de François Romain avant de partir. Mais je l’ai entendu à la radio je n’ai donc pas vu son visage.

 

Jim: c’est peut-être pas moi ! C’est peut-être juste un mouchoir que j’ai trouvé ou c’est ce François Romain qui me la donné ! On s’est peut-être croisé un jour ! Je préfère pas savoir, mets-moi au soleil Jo!

 

Jo : Tiens mon bras ! Assied-toi! Là ! Juste à coté de moi. 

 

Jim: C’est agréable, c’est incroyable comme on perçoit chaque chose plus intensément, lorsqu'on ressent que c’est la dernière fois.

 

Jo: Il faut profiter de chaque seconde.

 

Jim: C’est bizarre, on m’a souvent demandé ce que je ferai s'il ne me restait que quelques minutes à vivre! Je n’aurais jamais répondu : profiter du soleil une dernière fois !

 

Jo: J’entends du bruit, j’ai l’impression qu’ils arrivent.

 

Jim: On reste ensemble Jo!

 

Jo: N’aies pas peur!

 

Jim: T’es un ami tu sais !

 

Jo: Toi aussi t’es un ami !

 

Jim: qu’est-ce qu’ils foutent, vite qu’on en finisse une fois pour toute !

 

Jo: il vont nous faire mariner pour prolonger la torture.

 

Jim: C’est idiot, mais j’ai encore un peu d’espoir.

 

Jo: moi aussi, j’ai toujours l’espoir qu’un peu d’humanité leur traverse l’esprit et qu'y nous relâcherons ou alors que des compatriotes viendront nous sauver au dernier moment, comme dans les films lorsque le héros sauve tout les bons.

 

Jim: ils se rapprochent. Elle est pas là!

 

Jo: qui ça ?

 

Jim: Mon ange, je pensais qu'elle serait là le moment venu ! tu sais la jolie blonde que j'ai vu une fois!

 

Jo: Ils nous laissent tous tombé Jim, pense plus à elle, la mort ça fait peur, on a que tout les deux pour crever!

 

Jim: je pensais que je verrais quelqu'un, juste un moment, c'est dur! il se dégage du soleil

 

Jo: attend Jim, reste encore un peu dans le soleil, reste un peu avec moi.

 

Jim: j’ai envie que ce soit fini, le plus vite possible.

 

Jo: c'est con mais je peux pas m'empêcher de penser à cette fichu boite, pourquoi ils nous ont donné ça ?

 

Jim: pour qu'on se torture la cervelle, en faite je crois que je sais ce qu'elle représente

 

Jo: c'est quoi Jim! hein c'est quoi cette boite?

 

“Ils” ne sont pas des personnages visuels, on imagine leur présence, les comédiens devront nous les faire exister.  “Ils” entrent,  Jim et Jo sont enlacés dans les bras l’un de l’autre, ils se disent adieu

“Ils” les séparent , on voit des mouvements brusques, les bras de Jo sont soudainement tirés vers le haut pour être ligotés. Jo est amené  vers la sortie

 

Jim: Bande d’enfoirés vous pouvez pas nous laisser nous dire adieu ?

 

Jo: On part ensemble, hein, vous n’allez pas nous tuer l’un après l’autre ? on veut rester ensemble!

 

Jim: Vous avez entendu ? On veut crever ensemble ! Pas chacun son tour !

 

Jim est poussé par “ils” il cherche son copain avec ses mains, mais “ils” transportent Jo vers la sortie.

 

Jo: Jim je veux pas être seul! Me laisse pas seul Jim!

 

Jim: écoute ma voix, pense au “Saint Jacques ” !

 

Jo: j’ai peur Jim, dis une prière pour moi !

 

Jim: je suis avec toi Jo, on se retrouve au “Saint Jacques ” !

 

Jo: je vois le soleil Jim, c’est drôlement beau.

 

Jim: Pense au Saint Jacques, rendez-vous à notre table Jo!

 

Jo: Non je veux pas de bâillon s’il vous plait ! NON! je veux encore voir le ciel ! je veux voir le ciel avant de mourir !

 

Jim: Il vous a dit pas de bâillon, merde !!enfoirés !

 

Jo:  il chante, hésitant au début “ils” lui demande de se taire “ils” n’ont pas l’air content “ils” lui hurlent dessus mais Jo continue, de plus en plus affirmé "les fenêtres nous guettent quand nos cœurs s’arrêtent en croisant Louisette, c’est ça Jim ?

 

Jim: Oui c’est ça

 

Jo: c’est quoi la suite, chante avec moi Jim.

 

Jim:" pour qui brûlent nos chairs"

 

Jo:  pour qui brûlent nos chairs.

 

Jim et Jo : chantent tous les deux Jo toujours un peu après Jim, puis au milieu de la chanson on entend un bruit de mitraillette Jo ne chante plus mais Jim continue seul,